Vivante, multiforme, portée par des éditeurs passionnés et des lieux émergents, la poésie contemporaine affirme sa vitalité. Même si elle reste méconnue du grand public, le regain d’intérêt pour ce champ littéraire est alimenté par de nouvelles formes scéniques et digitales.

Laurent Cauville  / aprim

Non, les poètes ne sont pas morts et leurs textes ne disparaissent pas sous la poussière. Comme c’est le cas au Canada, aux États-Unis ou en Belgique, on dirait bien que la poésie reprend pied en France, sous l’impulsion d’auteurs de toutes générations. On la sent requinquée par la combinaison des formes, par la passion et la persévérance d’éditeurs et de lieux nouveaux, où elle s’exprime à voix haute, et s’incarne pour toucher directement un public curieux et multiforme.

C’est en tout cas la tendance en Normandie, terre d’écriture pour l’auteur Christophe Manon, croisé en pleine session d’écriture à la Villa La Brugère (Arromanches) en avril dernier. « Comme tous les genres marginaux, la poésie est bourrée de vitalité. Un substrat où circule une vie souterraine, peu visible mais réelle, avec des auteurs, des éditeurs, des lecteurs et des auditeurs. Sa fragilité économique fait aussi sa force, elle lui permet de surgir dans toutes les conditions, ici via un festival, là une maison d’édition, ou une revue. »

Nouveaux terrains de jeu

Très discrète dans les librairies, délaissée par la presse, la poésie trouve d’autres terrains. « Les manifestations littéraires sont une nouvelle voie intéressante, poursuit l’auteur, devenu adepte de la lecture sur scène, à haute voix (lire par ailleurs). Aujourd’hui, on peut facilement réunir 50 personnes un soir, pour écouter des textes. »

Même si elle regrette que la poésie se vende si mal, la poétesse Françoise Coulmin, 81 ans, publiée depuis une trentaine d’années (notamment chez La Feuille de Thé), apprécie l’émergence de nouveaux vecteurs et de nouvelles formes. « L’Internet y est pour beaucoup, on peut facilement diffuser et lire de la poésie en ligne. Par ailleurs le paysage foisonne d’éditeurs, de nouvelles revues apparaissent. » L’autrice apprécie surtout que la poésie « concerne aussi beaucoup d’auteurs amateurs, qui écrivent pour exprimer une révolte, un élan, d’une façon plus ou moins spontanée, ce qui produit toutes sortes de formes, qui vont de l’alexandrin au slam ».

À Caen, Yohan Leforestier, alias « Yo du milieu », joue (entre autres) au « crieur public », mêlant poésie, slam, arts de la rue et théâtre. « La poésie, c’est plein de formats possibles, et j’aime la voir naître dans le partage et une dimension un peu artisanale. » Par exemple, dans la rue, à travers son personnage de « M. PasseMoiLeMot », il transforme en petites fulgurances poétiques déclamées les humeurs récoltées auprès du public, sur des petits bouts de papier. « Une poésie qui s’écrit avec “Madame et Monsieur Tout le Monde et qui s’inscrit dans le quotidien. »

Poésie incarnée

À l’image de Christophe Manon venu s’atteler en Normandie à un nouveau texte pour « faire cohabiter la prose et de la versification », un vent de liberté formelle souffle sur la poésie. La rime y est une option. Une prose musicale et percussive se déploie et bouscule le lecteur, des punchlines apparaissent, le jeu typographique crée des étincelles… De plus en plus d’auteurs vont aussi au-devant du public, au gré de lectures incarnées, sonnantes, musicales parfois. « La poésie aujourd’hui s’envisage au pluriel, remarque Adeline Miermont-Giustinati, poétesse et créatrice de la nouvelle revue poétique et féministe Carabosse. Les courants se rejoignent, les poètes montent sur scène, les slameurs sortent des livres, les réseaux sociaux portent les mots. » Avec David Spailier, sous le nom d’Eunice 13h02, elle publie depuis peu des poèmes sonores et des vidéopoèmes, diffusés sur Soundcloud, YouTube et Facebook.

 

Du classique à l’expérimental

Dans cette abondance créative, les éditeurs jouent un rôle d’aiguilleur et d’intermédiaire avec le public. Chez Lurlure (Caen), Emmanuel Caroux reçoit en moyenne une dizaine de manuscrits par semaine : « Des écritures qui vont du classique à l’expérimental. » Lurlure vient ainsi de publier Milène Tournier, « dont l’écriture s’élabore à travers des pratiques numériques : vidéos, réseaux sociaux... » mais aussi de rééditer Cent Ballades d’amant et de dame, de la poétesse médiévale Christine de Pizan. Le climat n’est pas à la concurrence. « Il y a de bons éditeurs de poésie en Normandie et nos relations sont bienveillantes », décrit Emmanuel Caroux.

Fondatrice des éditions La Feuille de Thé, Ghislaine Brault confirme. « Au Marché de la Poésie (Paris) de juin, j’inviterai mes amies éditrices du Soupirail et de Phloème. C’est sur ce genre d’événement qu’il faut capter le public, ou dans les nouveaux lieux qui accueillent la poésie. » Salons, festivals, espaces de performance : les lieux de poésie se multiplient (lire en page 12). Sur le modèle de La Factorie, née en 2016 à Val-de-Reuil, Adeline Miermont-Giustinati s’emploie à créer une Maison de poésie dans le Cotentin. Sans parler de ces bistrots, au Havre, à Fécamp, à Granville, où slam et poésie chantée font vibrer soucoupes et sous-bocks. L’avenir des poètes ne semble pas maudit.

Repères

Les revues spécialisées en Normandie

Sources : Normandie Livre & Lecture et Ent’revues

Retrouvez tous les acteurs du livre sur l’annuaire en ligne de Normandie Livre & Lecture

Découvrez la chronique de l'anthologie Riverains des falaises des éditions Clarisse.

ÉDITEURS ENGAGÉS

Comme le dit Christophe Manon, publié chez l’éditeur caennais Nous (Benoît Casas), « la poésie s’appuie sur un tissu de très petites maisons qui publient peu d’ouvrages à l’année mais sont portées par de vrais passionnés ». Exemple avec La Feuille de Thé, maison fondée par Ghislaine Brault dans le pays d’Auge en 2005, avec une vingtaine d’auteurs publiés en 17 ans (28 recueils au total). Comme chez ses consœurs, enthousiasme et engagement sont déterminants. « Certains de nos livres sont fabriqués au plomb, comme au XIXe siècle, parce que la poésie, c’est aussi produire de beaux objets », complète l’éditrice, qui diffuse ses livres elle-même. Parmi ses auteurs phares, citons Françoise Coulmin (prix Antonio-Vicario 2012), dont elle a publié quatre recueils. Récemment, un autre de ses titres, Comme passe le vent, de Philippe Pujas, a obtenu le prix Verlaine de la Maison de poésie Émile-Blémont.

 

Économiquement fragile
Emmanuel Caroux © Lurlure

« J’aime traquer le texte rare. » Le jeune éditeur Emmanuel Caroux témoigne aussi de cette passion. Il a créé Lurlure en 2016 tout en conservant une activité parallèle, « parce que le modèle économique est fragile ». Il publie 7 ou 8 livres par an, dont deux tiers de poésie, diffusés via un réseau de librairies indépendantes en France, Belgique et Suisse. Emmanuel Caroux vit son projet « comme un engagement à faire découvrir des textes et accompagner des auteurs… ». Il publie depuis peu la mythique revue TXT, et veut « réfléchir à d’autres formes de diffusion ». Lui aussi regarde de près comment le digital peut servir la cause des auteurs et des mots. Lurlure est présent sur Facebook et va s’aventurer sur Instagram. « La création est soutenue, conclut-il, en témoignent les nombreuses revues comme Décharge, TXT, Catastrophes… Et de nombreuses se créent en ligne. C’est un signe de vitalité, un encouragement pour nous. »

Retrouvez les versions longues des interviews de Christophe Manon, Ghislaine Brault et Emmanuel Caroux

LIEUX DE MOTS

Scènes ouvertes au fond des bistrots, ateliers en maisons de poésie, résidences de création (Villa La Brugère, Moulin Blanchard…), les lieux où la poésie éclôt, se déclame ou se chante se multiplient. « Ils font sortir la poésie des livres, la rendent plus accessible », glisse Patrick Verschueren, à La Factorie, Maison de poésie, installée à Val-de-Reuil. « Une maison de poésie, ça ne sert à rien, ose-t-il. Sauf à susciter une demande. Ici, en six ans, nous avons vérifié qu’il y avait des attentes côté public et poètes. »

La Factorie à Val-de-Reuil, première maison de poésie de Normandie, fait des émules © La Factorie

« La poésie comme matériau »

Lieu de création, de sensibilisation et de diffusion, La Factorie accueille aussi « des artistes de théâtre, de cirque ou de chanson, utilisant la poésie comme matériau ». Elle a reçu 27 auteurs en résidence cette année, « chacun consacrant environ 20 % de son temps au territoire, notamment auprès des scolaires ». En janvier, lors du festival Les poètes n’hibernent pas, 12 auteurs ont rencontré 45 classes dans la région. Sa maison d’édition, Les carnets du dessert de lune, a déjà publié 150 titres. Elle a essaimé à Rouen, avec la Maison de la Poésie et de l’Oralité, présidée par Alexis Pelletier (une dizaine de rencontres et plusieurs résidences).

Aujourd’hui le lieu veut développer ses relations avec d’autres, à Regnéville-sur-Mer, au Québec, à Rouen ou dans le Cotentin… où une autre maison de poésie prend forme, sous l’impulsion de l’autrice Adeline Miermont-Giustinati. Le lieu totem du projet est le moulin Marie-Ravenel (Vicq-sur-Mer), du nom d’une meunière-poétesse du XIXe. « Ce sera son premier lieu d’accueil, dès cet été, avec des ateliers, des balades d’écriture, des lectures, précise-t-elle. Mais j’aime l’idée d’une maison nomade. L’accent sera mis sur les voix féminines et la forme sonore, avec la création d’une webradio ou de podcasts poétiques.»

« À sa création, notre maison de poésie a pu soulever du scepticisme, ajoute Patrick Verschueren, mais nos réponses sur des enjeux comme l’alphabétisation et la lecture à haute voix ont convaincu. » La Factorie est aujourd’hui soutenue par l’État, la Région, le Département et la Ville de Val-de-Reuil. À Caen aussi, son exemple donne des idées, avec un projet similaire en gestation. À suivre.

 

Retrouvez les versions longues des interviews de :

« Perdre pied dans la langue »

Alexis Pelletier, âgé de 58 ans, auteur d’ÉrotoMlash (éd. Rougier V.), installé près de Rouen, il dépasse l’écriture seule et emmène volontiers sa poésie vers les arts plastiques, la danse et la musique contemporaine.
Alexis Pelletier © D.R

« Le fait de travailler avec des danseurs et danseuses, avec des musiciennes et des musiciens, qui composent ou qui interprètent ce qui est joué, avec des plasticiennes et plasticiens, avec des comédiennes et comédiens, permet d’aller vers l’autre, de découvrir d’autres univers et, ainsi, de remettre en cause habitudes et certitudes. Ce sont des expériences très enrichissantes, y compris dans les hiatus que des esthétiques immanquablement différentes peuvent produire. Cela conduit, pour moi, à perdre pied dans la langue. Et surtout à quitter une attitude qui peut être trop asservie à ce qui est uniquement rationnel. Quand un compositeur comme Dominique Lemaître me dit qu’il veut un texte pour tels instruments ou bien qu’il souhaite que je mette les mots que je veux sur une partition déjà composée, c’est toujours quelque chose de neuf. La contrainte fait que les mots peut-être acquièrent une présence physique encore plus grande. C’est pour moi salutaire. Je suis friand de ces rencontres et prêt… à étudier toutes les propositions ! »

Retrouvez la version longue de l’interview d’Alexis Pelletier

EN CHAIR ET EN NOTES

« J’adore les livres, mais certaines formes de la poésie peuvent s’en émanciper. » Entre performance et méditation active, la poésie de Marion Renauld prend corps dans une machine à écrire, qu’elle installe dans la rue ou au cœur d’un quartier, au plus près des habitants. Son terrain de jeu : « Les formes spontanées... » Marion Renauld frappe les mots et les offre à ceux qu’elle croise. « Inscrire l’écriture au quotidien, et publiquement, change notre regard sur la réalité. » Ses poèmes, toujours inédits, peuvent se lire sur les murs (délicatement patafixés), ou même sur des billets de banque. « Ce genre de poésie performative, à la fois politique et populaire, parle à tous, sans question d’accessibilité. » Et elle « plaît au public », commente Patrick Verschueren, qui a accueilli Marion à La Factorie (1).

Magie du moment

Ainsi, le son, la voix, la mise en musique sont les nouveaux habits du genre. Publié depuis près de vingt-cinq ans, Christophe Manon diffuse aussi à haute voix. « Je lis mes textes en public depuis une dizaine d’années. Mon premier geste reste l’écriture, mais ce rapport direct qui raccroche à la tradition des troubadours est une caractéristique intéressante de la poésie contemporaine. J’aime aussi allier les mots et la vidéo. »

La « mise en spectacle » peut d’ailleurs aider à la reconnaissance d’un texte. L’éditrice Ghislaine Brault (La Feuille de Thé) l’a constaté avec J’aurais préféré que nous fassions obscurité ensemble, de Claire Audhuy, dédié à son mari, mort au Bataclan en 2015. « Le recueil
a été adapté et joué en Avignon l’été dernier. La pièce a eu du succès, ce qui a relancé les ventes du livre. »

Au Havre, la poésie rencontre la musique sur des scènes ouvertes de plus en plus actives.

Poésie chantée à La Causerie, au Havre © DR

L’auteur, chanteur et guitariste Grégoire Théry (alias « Havres »), installé là-bas depuis peu, y voit éclore un réseau où s’écoute une poésie chantée ou déclamée : La Causerie, Le Bistrot, Les Yeux d’Elsa (café littéraire), la galerie Incarnato… « Pas une semaine sans une scène ouverte de slam ou de poésie orale. Je suis stupéfait par la diversité des profils, des classes sociales, des styles… Pour moi qui pratique une poésie chantée, c’est très stimulant. » Une fois par mois, toute une bande d’auteurs havrais « monte » vers Fécamp, au Bar Zoo, « où l’on en croise encore d’autres venus du pays d’Auge et même de Granville ». Tout ce petit monde envisage d’ailleurs de créer un festival de l’expression poétique orale, au Havre, dès octobre prochain, et une édition plus régionale en 2023.

Comme le souligne Marion Renauld, « l’idée c’est d’être en présence, plus que d’être en représentation. Les gens sont d’autant plus touchés qu’on réduit la distance. Et il y a la magie du moment unique ».

(1) Son interview vidéo sur la chaîne YouTube « La Factorie Maison de Poésie », playlist "Rencontre en poésie"

Retrouvez Grégoire Théry sur Facebook : Havre Poésies

« Jouer avec les mots pour les voir autrement  »

Yo du Milieu Le Caennais Yohan Leforestier, alias Yo du Milieu, se définit comme un « crieur public », qui mêle poésie et slam avec arts de la rue et théâtre.
© DR

« Je suis un diseur de mots, j’aime les faire sonner. J’aime quand le son fait sens. Avec la poésie, on peut tout se permettre. Une pratique sonore est un bon vecteur de lien avec les mots.

La poésie s’inscrit dans plein de formats différents. Avec le slam, les mots ne dorment pas sur le papier, on les reprend, on ajuste, on relit, on réécrit. J’aime cette dimension artisanale, ce côté “fait main”, parfois directement avec le public. Enfant, je n’ai pas baigné dans les livres, je n’ai pas rencontré le prof de français qui m’a fait flasher. Mais avec San Antonio, le rap, Gainsbourg et Bobby Lapointe, j’ai découvert ce qu’on pouvait faire avec les mots. Jouer avec eux permet de les voir autrement. »

Retrouvez la version longue de l’interview de Yo du Milieu

Libre cour(t) : François David

Une page blanche, une inspiration... Dans chaque numéro de Perluète, un auteur invité prolonge le thème du dossier du mois.

« Je savais combien, en poésie, les mots souvent nous relient. Mais qu’ils puissent même ranimer, et que cela se soit passé sur les réseaux sociaux, je ne m’y étais pas attendu. Comme une évidence s’est imposée l’envie de le " partager ". »

C’était le premier confinement. Jour après jour, je lisais des extraits de mes recueils poétiques sur Facebook et sur Instagram. À côté des  et des , je vis le message d’une personne demandant comment avoir l’un des ouvrages*. Je lui indiquais des librairies de sa ville, mais elle me répondit sèchement qu’elle savait bien où on achetait un livre. Seulement, elle n’avait pas de quoi le payer. Et les textes qu’elle avait entendus l’avaient touchée d’une manière si particulière. Quasi vitale. Elle avait besoin de ce livre.

Le jour où je lui remis un exemplaire, elle me raconta les terreurs qu’elle avait endurées les dix dernières années. Presque tout s’était effondré. Or les livres continuaient à compter comme avant. En revanche, elle ne parvenait plus à les lire. Après ce qu’elle avait subi, elle ne pouvait plus se concentrer. Mais soudainement, sur Internet, elle avait entendu ce texte lui parler tellement fort. Il lui avait semblé qu’elle pourrait le lire aussi avec les yeux. Et après, peut-être, à nouveau aussi relire les autres livres. Comme une clé pour rouvrir ce qui avait été violenté. Cadenassé.

J’ai pensé à Apollinaire qui, sous les obus qui vont l’atteindre à la tête, réussit à s’émerveiller : « Que c’est beau ces fusées qui éblouissent la nuit ! » Au mourant, dans un camp sinistre de mort, auquel Jorge Semprun murmure des vers comme dernier viatique apaisant le terme du chemin. À Baudelaire et son rêve d’un vitrier qui, en dépit de tout, ferait « voir la vie en beau ».

La puissance étonnante de la poésie. Sa présence et sa grâce. N’importe où. Par tous les pores. Toutes les ondes. Et alors, sur la Toile aussi, la scintillation des étoiles.

*Et c’est moi que je vois, Éditions du Vistemboir.

Découvrez une chronique de Quatre pousses de riz vert, de François David (éd. La Feuille de Thé)

 

François DAVID © DR

Bio express

François David vit en Normandie, dans le Nord-Cotentin, au « bout du bout » pour reprendre un de ses titres.

Il a publié plus de cent livres, en des genres divers, dans de nombreuses maisons d’édition. Plusieurs de ses textes ont été portés au théâtre, en France et à l’étranger. Ses livres sont traduits dans une quinzaine de langues (dont le danois, le chinois, le coréen, l’italien, le lituanien, le catalan... et l’espéranto).

 

Découvrez des lectures d’extraits d’œuvres de poètes normands

[Dossier] Poésie(s) en liberté