En 1924, Roger Martin du Gard s’installe au Tertre, qu’il vient d’acheter à ses beaux-parents. Il entreprend des travaux considérables pour établir son bureau et sa bibliothèque. Mêmes fauteuils, mêmes livres, la bibliothèque est restée telle qu’il l’a conçue, et c’est un privilège offert au visiteur que de la découvrir.
La destination du Tertre a changé. Ce sera une maison pour écrire l’œuvre littéraire et pour recevoir des artistes et des écrivains, comme en témoignent les nombreuses photos qui ornent son bureau. Très émouvante à voir, cette pièce est restée intacte, elle aussi. Commence alors une étroite relation entre le lieu, la maison, et l’œuvre qui s’y crée, relation qui se révèle fondamentale dans Maumort : le Saillant, alias le Tertre, est au centre du roman. C’est au Tertre que Roger Martin du Gard écrit une grande partie de son œuvre jusqu’à sa mort en 1958.
Le Tertre aujourd’hui
Après la mort de l’écrivain, sa fille, Christiane Martin du Gard, invite à son tour poètes et artistes au Tertre. Depuis 1973 jusqu’à nos jours, sa petite-fille, Anne Véronique de Coppet, est propriétaire du domaine avec ses enfants. Avec l’aide de l’association des Amis du Tertre, elle le transforme peu à peu en un lieu classé Monument historique, ouvert au public, proposant des résidences artistiques et une programmation culturelle.
Le parc
Le parc du Tertre (9 ha), inscrit parmi les Jardins remarquables et les Monuments historiques, offre au visiteur un magnifique panorama sur Bellême et sa forêt. Il se compose de trois parties : les parterres, les massifs boisés, les prés et les sources. Martin du Gard fit ajouter un bassin et une fontaine ornée d’une statue de Flore qui fait face aujourd’hui à Sapho, une pièce de Marc Vellay (2003). Un jardin plus secret a été créé, orné de trois fabriques, dont la plus spectaculaire est le temple de la Philosophie. Ce jardin donne au parc du Tertre son caractère exceptionnel, le rattachant aux mouvements cosmopolites de la pensée européenne du Siècle des Lumières.
Écrire au Tertre
Activité primordiale au château du Tertre, des ateliers d’écriture sont animés par Béatrice Limon formée à l’institut Aleph écriture, les jeudi, vendredi et samedi.
Renseignements : ecrireautertre.fr - Inscriptions : 06 17 15 21 27
Le domaine du Tertre accueille des étudiants pour des formations artistiques. Des résidences de création sont également proposées à des artistes (musiciens, comédiens, écrivains).
En 2022-2023, un chantier d’envergure « Un toit pour le Tertre » vise à la restauration de la toiture, datant de plus de cent ans. Cet important projet de restauration peut être soutenu par des dons.
Découvrir l'homme c'est ouvrir son journal
Journal I Textes autobiographiques 1892-1919
Le 1er volume du journal de Roger Martin du Gard est publié sous la direction de Claude Sicard en 1992. Il réunit ses papiers antérieurs à 1919, ses correspondances avec ses proches et ses amis, dont Marcel de Coppet, le poète Gustave Valmont et le musicien Pierre Margaritis. S’y ajoutent aussi son journal de guerre et un chapitre de ses souvenirs d’enfance. Le « vrai » journal tenu par l’auteur, entre 1919 et 1949, est publié l’année suivante en deux volumes supplémentaires. Conscient que les archives de toute sa vie sont d’un grand intérêt, bien plus peut-être que ses romans, R.M.G. a laissé des consignes rigoureuses pour les préserver et les communiquer. Conformément à sa volonté, elles ont été déposées par sa famille à sa mort en 1958 à la Bibliothèque nationale de France (cote NAF 28190).
« Tant vaux l’homme, tant valent ses souvenirs […] la quête secrète de ma vie aura été l’horreur de l’oubli et de la mort »
1918, lettre à sa fille
Cette première partie de sa vie, se découvre au fur et à mesure des échanges avec ses proches. Elle nous propose une lecture intime de l’homme. Il a conscience dans ses écrits de laisser une minutieuse analyse de lui-même, de son évolution, de ses étapes de travail, de ses amitiés, de sa vie privée et des événements dont il a été le contemporain. Bien avant de nourrir son œuvre, le « petit journal de vie » comme il le nomme précisément dans une lettre adressée, en 1915, à sa femme, lui procure de la joie. Enfant timide, il comprend dès son jeune âge que l’écriture est un moyen de communication idéal. Il s’amuse et prend beaucoup de plaisir à coucher ses idées sur le papier. Lors des périodes difficiles, l’écriture lui permet d’exorciser ses angoisses, de les fixer et de prendre de la distance. Ses carnets de guerre serviront naturellement son roman Les Thibault, tome 2 : La mort du père – L’Été 1914. Ils sont une source d’inspiration et nourrissent sa réflexion. Son vécu sert de cadre aux événements dont il a été le contemporain.
La bibliothèque
Si l’on s’en tient au catalogue de la bibliothèque de R.M.G. par Jochen Schlobach, Livres, lectures, envois d’auteur : catalogue de la bibliothèque de Roger Martin du Gard, le château du Tertre abrite 11 000 imprimés, livres et revues en majorité, présentés dans la grande salle du rez-de-chaussée accessible au public. La pièce est remarquable parce que les étagères, le classement et l’organisation sont préservés. Les étiquettes sont écrites de la main de R.M.G. et le double alignement des volumes est organisé pour faciliter le travail de l’écrivain. À côté des classiques, plus de 2 000 livres portent une dédicace ou un envoi d’auteur connu ou inédit adressé au romancier. Par leur existence et leur teneur, ces textes mettent en lumière un réseau de rapports intellectuels et littéraires dans lequel se mouvait Roger Martin du Gard dans la première moitié du XXe siècle.
Le grand romancier
Dès le lycée où il rencontre le jeune Gaston Gallimard, Roger Martin du Gard (1881-1958) découvre sa vocation d’écrivain. Après des études de lettres avortées, il s’inscrit à l’école des Chartes et obtient son diplôme d’archiviste paléographe en 1905. En 1906, il épouse Hélène Foucault, fille d’Albert Foucault, avocat et propriétaire du château du Tertre. À 25 ans, il affirme son désir d’être écrivain. Dès le début de son voyage de noces en Afrique du Nord, il s’attelle à la préparation d’un roman qui restera inachevé (Une vie de saint) et publie en 1908 Devenir.
La publication de son roman Jean Barois en 1913, édité à la NRF, lui permet de se lier d’amitié avec André Gide et Jacques Copeau.
Mobilisé sur le front en 1914, témoin des atrocités de la guerre, il exprime son pacifisme idéaliste dans ses lettres et son journal, et en rapporte le projet d’un « roman de longue haleine » : Les Thibault, œuvre majeure en huit volumes qui va l’occuper de 1920 à 1940. Héritier de la tradition réaliste-naturaliste et en particulier de la forme du roman familial, Martin du Gard brosse un tableau sans complaisance de la société de la Belle Époque.
C’est en 1937, juste après la publication de L’Été 1914 (7e volume), que Martin du Gard se voit attribuer le prix Nobel de littérature.
Véritable consécration, la Bibliothèque de la Pléiade regroupe de son vivant ses Œuvres complètes, qui paraissent en 1955 préfacées par Camus.
Le Tertre
61130 Sérigny, Belforêt-en-Perche
Tél. : 02 33 73 18 30 ou 06 17 15 21 27
www.letertre-rogermartindugard.fr
La visite extérieure du domaine est ouverte du 1er juillet au 15 septembre, de 13h à 19h (entrée gratuite). Pour les groupes, ainsi que pour les visites de l’intérieur du château et les visites hors saison, prendre rendez-vous.