Pop délirante et hallucinogène

Dans un conte où l’humour noir côtoie le loufoque, Julie Chapallaz explore les possibilités du roman-photo.
© FLBLB éditions

Comme dans les rêves, dont la logique et la densité nous échappent une fois éveillés, résumer La Déflagration des buissons semble réducteur.

Dans un monde soumis à un sommeil irrésistible, où la vie éveillée se réduit à quelques minutes sans mémoire, Edgar cherche à retrouver des traces de son passé. Il croise alors des personnages hauts en couleur, qui ont, chacun à leur façon, trouvé un moyen de ne pas s’endormir.

Le roman-photo crée de fait un monde à l’arrêt, où les séquences se juxtaposent. Ici, le scénario, comme les personnages, semble prendre corps à partir d’imaginations visuelles affirmées. Se plaçant dans la lignée des Monty Python et de Hara-Kiri, Julie Chapallaz joue sur le côté désuet du roman-photo pour lui accoler son univers pop de collages. Empruntant aux films muets l’exagération des mimiques, l’autrice semble s’amuser du faux pour trouver un autre réel. Ludique, onirique, psychédélique, symbolique, le monde de Julie joue sur les contrastes entre une atmosphère visuelle baignée d’une sorte de nuit perpétuelle, des couleurs quasi fluorescentes, et les bulles blanches qui tranchent. Dans cet univers surréaliste, l’ouvrage est construit en chapitres comme une tentative d’organiser, d’appréhender la réalité, alors que celle-ci échappe toujours. Comme Edgar qui tente de garder le contrôle en échappant au sommeil.

Drôle, hypnotique, inventif, La Déflagration des buissons explore ces espaces, entre rêves et cauchemars, d’où une nouvelle réalité, à travers de confuses paroles, peut émerger.

Cécile Thimel

Mots choisis

« La rencontre possible avec mon frère est une histoire de probabilités… que calcule un ours au fond d’une forêt tronçonnée par des bûcheronnes fanatiques. Est-ce raisonnable ? »

[Chronique] La Déflagration des buissons de Julie Chapallaz