Flaubert, classique du XXIe siècle
La Normandie célèbre en 2021 le bicentenaire de la naissance d’un de ses plus célèbres écrivains, Gustave Flaubert. Une année faste, avec plus de 150 projets et manifestations partout dans la région d’avril 2021 à juin 2022, labellisés par le collectif Flaubert 21, à l’initiative de collectivités territoriales.
Une programmation tous azimuts, pour découvrir ou redécouvrir une icône de la littérature, auteur dit « classique » mais dont l’œuvre nous parle d’enjeux contemporains.
Par Valérie Schmitt et Claire Audoucet
Les manifestations labellisées pour ce bicentenaire ont été pensées pour satisfaire tous les publics « et multiplier les voies d’accès à Flaubert, par des voies innovantes numériques en particulier », souligne le spécialiste de l’auteur Yvan Leclerc, président du comité scientifique et culturel Flaubert 21 (1).
Car lire Gustave Flaubert en 2021 est toujours d’actualité. Son œuvre parle de notre présent. Elle interroge la place des femmes dans la société, avec son personnage emblématique de Madame Bovary, « qui a fait exploser l’image de la femme ! » rappelle l’auteur et réalisateur Christian Clères. Elle s’élève aussi contre l’arrogance et la bêtise de ses contemporains, dans le roman inachevé Bouvard et Pécuchet.
Flaubert est également fasciné par la science (son père était un chirurgien de renom) et, comme le rappelle Yvan Leclerc dans un podcast (lien en fin d’article), « il a vécu la grande épidémie de choléra en 1832 et connu la quarantaine à Beyrouth ».
Extrait d'une lettre de Flaubert à George Sand (1872)
"J’écris non pour le lecteur d’aujourd’hui, mais pour tous les lecteurs qui pourront se présenter tant que la langue vivra."
Dix écrivains tweetent Flaubert
Pourquoi ne pas relire Flaubert... en tweets ? C’est l’idée du Projet Bowary du collectif d’auteurs Baraques Walden : 280 tweets en 280 jours, ou la réduction de Madame Bovary en tweets. Stéphane Nappez, à l’initiative du projet, a passé quelques coups de fil à des amis écrivains (Julia Kerninon, Arno Bertina, Emmanuel Renart, Laure Limongi, Fabrice Chillet, Agnès Maupré, Frédéric Ciriez, Fred Duval, Maylis de Kerangal, Vincent Message). Dix d’entre eux se sont pris au jeu, et ce qui avait commencé comme une boutade se révèle un formidable exercice de lecture approfondie. « C’est drôle et c’est une manière intime de lire une œuvre, dit Stéphane Nappez. On donne aussi la possibilité à des auteurs de faire un travail collectif, de s’amuser, de se frotter à un réseau social qui peut être dur. »
Diffusés de janvier 2021 jusqu’en novembre, ces messages suscitent des retours de lecteurs enthousiastes. « Ils relisent Madame Bovary et dépassent le souvenir scolaire qu’ils pouvaient en avoir, ils perçoivent de nouvelles choses. » Quant à savoir si Flaubert aurait écrit sur le réseau social, Stéphane Nappez estime, enthousiaste, que « Flaubert aurait adoré déglinguer du bourgeois sur Twitter ! »
Le climax de ce projet aura lieu en octobre 2021 pendant le festival Terres de Paroles (sous réserve des conditions sanitaires), avec la complicité du groupe Chiendent, qui travaille à une projection des tweets avec un groupe de jeunes du collège Maximilien-de-Robespierre de Saint-Étienne-du-Rouvray.
Et si la redécouverte de l’œuvre de Flaubert se faisait via le grand écran ? « Comment adapter Flaubert au cinéma ? » C’est l’une des questions qui se posera lors du colloque de l’Association culturelle du Moulin d’Andé. Les participants, particuliers et professionnels, réfléchiront aux choix à faire lors d’une adaptation et se questionneront sur la nécessité (ou pas) d’ancrer le travail plus fortement dans notre temps. Et si oui, comment ?
(1) Yvan Leclerc est professeur émérite à l’université de Rouen Normandie, membre associé du laboratoire Cérédi, spécialiste de Flaubert.
>>> Tous les projets labellisés Flaubert 21 sur : flaubert21.fr
Association culturelle du Moulin d’Andé - Contact : Adèle Lapôtre – 02 32 59 70 02 - a.lapotre@moulinande.asso.fr