© Daniel-Claude Collin

Cet ouvrage se révèle très intéressant pour connaître l’homme politique que fut André Marie, député puis maire en Seine-Maritime, déporté en 1944 car soupçonné de résistance. Fils et petit-fils d’instituteurs, ces « hussards de la République », c’est un politicien honnête, figure typique de la troisième et de la quatrième république ; cet élu local fut également ministre voire, brièvement, président du conseil. C’est en tant que ministre de l’Éducation nationale qu’il donna sa pleine mesure après la Seconde Guerre mondiale.

D’un point de vue poétique, il est très conventionnel ; il reprend comme thème principal celui du prisonnier séparé de sa bien-aimée. Pour l’expression, il privilégie des suites de quatrains rimés et surtout le sonnet, forme qui corsète les émotions ou les laisse à distance. Ce peut être aussi un parti-pris pour saisir l’instant, la scène rapide. Ou peut-être un moyen de garder sa dignité… Poète fort académique mais homme cultivé, il en est resté dans ses goûts poétiques aux Romantiques voire à la Pléiade. Ces poèmes valent surtout par les circonstances qui les ont suscités et, parfois, par un sujet peu classique : tel celui du prisonnier qui reçoit un colis et mange égoïstement sous les regards envieux de ses compagnons d’infortune. Scène bien vue en la diversité des sentiments subtilement suggérés.

Ce recueil vaut également par les illustrations que l’auteur a demandé à ses compagnons d’infortune, dessinateurs, peintres, graveurs… La diversité des styles et des techniques est un enchantement. Du dessin humoristique à l’aquarelle délicate, le camp de Buckenwald revit sous nos yeux, dramatique souvent mais sans misérabilisme.  Se révèle alors la principale qualité culturelle d’André Marie : son goût prononcé pour les arts plastiques et sa capacité à susciter les œuvres dans ce domaine ; il est alors beaucoup plus audacieux. Il a été le créateur du Musée dans la rue en tant que maire de Barentin (1945 – 1974), précurseur ouvrant ainsi la voie à tous les arts contemporains de la rue.

Daniel – Claude Collin

 

Poèmes de Buchenwald d’André Marie, Éditions des falaises, décembre 2019

[Chronique] Poèmes de Buchenwald d’André Marie