Le XIXème siècle a redécouvert le Moyen-Âge et en a retenu surtout les récits de chevalerie, entre prouesse et merveilleux, sans oublier les châteaux forts et les cathédrales.
Le siècle suivant a continué sur ce chemin tant au cinéma que dans les jeux numériques tels Games of thrones.
Trubert illustre une autre littérature médiévale moins connue du grand public mais tout aussi vivante et importante durant cette époque : les récits satiriques, fabliaux et autres soties.
L’œuvre la plus connue en ce domaine est constituée des nombreuses « branches » du Roman de Renart dont le héros, créé probablement par un clerc à la fin du XIIème siècle, connaîtra des suites jusqu'au XIVème siécle.
Dès le XIIème également, Audigier, en un langage ordurier, mélangeait l'épopée chevaleresque et le fabliau dans une parodie dominée par la scatologie où le chevalier était ridiculisé et conchié.
Trubert a repris cette veine quelque peu carnavalesque mais en centrant le texte sur le sexe et le cocuage des puissants, souvent stupides à l'instar d'Ysengrin, le loup. L'aptitude à se déguiser et à tromper son monde est une caractéristique que le héros, faux « simple », reprend de Renart. ; notre
protagoniste parvient ainsi au sommet de la société grâce à sa ruse et à ses capacités sexuelles. Son modèle n'y parviendra, dans des œuvres postérieures aux branches, qu'en se transformant en génie du mal, voire en être diabolique.
Honnêtement, en ses schémas narratifs, un peu trop répétitifs, Trubert risque de lasser.
Douin de Lavesne a dû le sentir car il n'en a pas fait une œuvre très longue. Et puis cela aurait été trop risqué de trop insister : le Moyen Âge ne détestait pas ce que Flaubert aurait volontiers qualifié d’ « hénaurme », mais il ne fallait pas outrepasser certaines limites !
Quant à la traduction de Bertrand Rouziès-Léonardi, elle est agréable à lire et fidèle au texte original. Un médiéviste ne saurait trouver à y redire.
Daniel Claude Collin