L’autrice jeunesse Coline Pierré
Coline Pierré est née en 1987. Elle a grandi en Alsace, a vécu dans différentes villes et habite aujourd’hui à Nantes. Elle a publié son premier roman (pour enfants) en 2013.
Elle écrit des romans, des albums et des nouvelles pour les enfants, les adolescents et les adultes et publie chez de nombreux éditeurs : Le Rouergue jeunesse, L’école des loisirs, Flammarion, Poulpe Fictions, Mango, La Plage… Elle a également publié un essai sur la fiction et les fins heureuses en littérature et au cinéma, intitulé Éloge des fins heureuses. Elle travaille régulièrement en collaboration avec d’autres écrivain.es ou dessinatrices. Pour la scène, elle créée, lit et met parfois en musique des lectures musicales, dessinées, performées… en duo ou en trio avec d’autres artistes. Son travail s’intéresse notamment à la question du langage, à l’écologie, aux animaux, au féminisme, au rapport que tissent réel et imagination, à la puissance politique de l’invention.
Avec son complice Martin Page, elle mène parfois des projets un peu fous, comme la création de Monstrograph, un laboratoire d’édition qui publie des livres dessinés à la main, de petits essais iconoclastes et des ouvrages collectifs qui interrogent les conditions de vie et de travail des artistes aujourd’hui.
Résidence artistique sur le territoire de l’Intercom Bernay Terres de Normandie
Dans le cadre de son projet culturel de territoire, l’Intercom Bernay Terres de Normandie porte, depuis 3 ans, la production d’un conte musical à destination des scolaires et du tout public. Cette résidence pluridisciplinaire de 3 artistes (un compositeur, un écrivain et un plasticien), a été renouvelée pour l’année scolaire 2020/2021.
La résidence est d’une durée de 4 semaines réparties entre septembre 2020 et juin 2021.
Pensée comme un projet novateur qui favorise la transversalité entre les différents arts, cette résidence a pour vocation de créer les conditions d’une rencontre entre les professionnels et les différents publics. Elle s’inscrit dans une démarche à la fois pédagogique et culturelle et repose sur le lien fort entre l’équipe résidente et le public.
Pourriez-vous rappeler, en quelques lignes, le sujet du projet d’écriture que vous avez commencé ou poursuivi en résidence ?
C’est une résidence en trio, avec un compositeur (Thomas Nguyen) et une plasticienne (Edel Truda). Nous avons chacun répondu à un appel à candidature, ne nous connaissions pas et avions pour objectif de créer ensemble un conte musical, en partenariat avec trois classes des écoles de l’intercom de Bernay et avec le conservatoire. Yuko, un loup à pas de contes, est donc né de nos discussions et de nos envies communes. Il met en scène un jeune loup à qui ses parents annoncent qu’il doit se trouver un conte pour se mettre à l’abri. Il part donc à la recherche de son histoire et croise en chemin de nombreux personnages qui tentent tous de l’influencer ou de l’entraîner dans leur conte.
Est-ce qu’il s’agissait de votre première résidence ?
J’ai déjà été en résidence au Chalet Mauriac (Aquitaine) en 2015, elle était consacrée à l’écriture d’un roman jeunesse. C’est la première résidence que je fais qui a pour objet une commande d’écriture et une création collective.
Pourquoi avoir choisi ce lieu de résidence ?
Je l’ai choisi d’une part pour le projet de création (conte musical en trio) autour duquel la résidence s’articulait, qui m’intéressait énormément pour les liens entre les disciplines, le travail collectif, le spectacle vivant. Mais ce projet de résidence m’intéressait aussi pour la possibilité de s’ancrer sur un territoire que je ne connaissais pas, d’en découvrir les spécificités, de travailler localement avec les élèves des écoles et les artistes du territoire (le conte a été interprété par des musiciens/enseignants du Conservatoire et une comédienne, tous en lien avec le territoire).
Qu’est-ce que vous appréciez le plus dans le fait d’être en résidence ?
D’un part le fait de consacrer un temps privilégié à un projet particulier. Qu’il s’agisse d’une texte personnel ou d’une création de « commande », la résidence permet l’immersion complète dans un travail, c’est un temps à part.
D’autre part, dans ce projet, j’ai apprécié aussi tout particulièrement la possibilité de travailler à plusieurs, d’expérimenter une nouvelle forme, de dialoguer avec d’autres disciplines artistiques et avec d’autres artistes.
Comment votre résidence vous a aidé dans votre projet d’écriture ?
Durant les temps de résidence, j’ai pu dialoguer et travailler avec la plasticienne et le compositeur avec qui nous avons créé ce projet, mais également rencontrer les élèves des trois écoles qui ont participé à l’écriture du conte.
Avec les classes, il y a eu un premier temps de rencontre / création d’une performance improvisée et participative en trio, un second temps d’écriture en février, et un troisième consacré à la mise en voix d’une scène du conte et à l’échange autour du projet. Le dernier temps de résidence (juin) a été celui des restitutions du spectacle (auxquelles les écoles et le grand public ont pu assister).
Dans le contexte particulier de cette année, comment avez-vu vécu votre résidence ?
C’était une véritable bulle d’air et d’espoir ! Nous avons donc vécu la résidence dans des situations très diverses, car nous sommes venus en novembre sous confinement (avec ouverture des écoles), en février sous couvre-feu, puis nous avons décalé notre venue d’avril pour cause de confinement, et terminé en mai et en juin. Continuer à se projeter dans une création pour la scène à une période où les théâtres étaient fermés depuis des mois, c’était une sorte de pari sur l’avenir, qui était particulièrement bienvenu. Je crois que nous sommes tous très heureux d’avoir réussi à mener ce projet à bien, en particulier d’avoir pu faire des représentations en public (ce n’était pas gagné).
Pourriez-vous décrire un moment fort de votre résidence ?
La première des huit représentations du spectacle a eu lieu le 17 juin au matin, et elle était réservée aux trois classes qui ont participé au projet. Les enfants avaient appris en classe les paroles de la chanson qui revient à plusieurs reprises dans le conte. Cette première représentation était non seulement émouvante car c’était la première, mais quand la soixante-dizaine d’enfants présents s’est mise à chanter spontanément le refrain en choeur, ça a été un grand moment d’émotion.
Quelle suite pour votre projet ?
Le spectacle est désormais créé, nous espérons qu’il va pouvoir continuer sa vie, en le montant ailleurs et/ou en le faisant éditer en version livre-cd dans une maison d’édition spécialisée dans ce format. Les 8 représentations ayant été filmées, il existera également d’ici quelques mois une captation vidéo du spectacle.
Propos recueillis en juin 2021 par Cindy Mahout