Mystique africaine

© Gallimard

L’écrivaine franco-rwandaise, autrice de Notre-Dame du Nil (prix Renaudot 2012), déploie ses talents de conteuse dans son dernier livre sur l’évangélisation du Rwanda dans les années 1930. Au Rwanda, parmi le flux des nombreux missionnaires, arrive une Africaine-Américaine, Sister Deborah, guérisseuse et prophétesse visitée par l’esprit de la mère Afrique, qui prêche non seulement le retour du Messie mais annonce qu’il prendra la forme d’une femme noire. Les femmes converties du village se rebellent alors contre l’ordre établi. « Les hommes restaient comme éberlués et impuissants devant la furie féminine. »

Mais « cette croisade des femmes » sera matée par l’administration locale et le patriarcat, laissant Sister Deborah pour morte, coupable d’avoir laissé espérer « mille ans de bonheur pour les femmes après des milliers d’années de malheur ».

Des années plus tard, Ikirezi, petite fille maladive du village de Nyabikenke, au Rwanda, arrachée aux ténèbres, selon sa mère, grâce aux pouvoirs de Sister Deborah, est devenue aux États-Unis la chercheuse africaniste Miss Jewels. Ikirezi décide de partir à la recherche de la guérisseuse. Car Sister Deborah a survécu. Elle est devenue Mama Nganga dans un township de Nairobi, au Kenya, et elle va livrer à Miss Jewels sa vérité.

Ce roman choral plonge à travers les rites et spiritualités de l’Afrique orientale et mène le lecteur à un dénouement inattendu.

 

Valérie Schmitt

 

Sister Deborah Scholastique Mukasonga, Gallimard, 2022

[Chronique] Sister Deborah de Scholastique Mukasonga