Pauline Kalioujny   « La nature est mon refuge et elle me pousse à créer »

Publié le 02/04/2024
Temps de lecture : 3mn
Plutôt qu’illustratrice, Pauline Kalioujny préfère se définir comme une plasticienne qui fait des livres pour les enfants. C’est sa manière d’affirmer la littérature jeunesse comme un art à part entière. Au fil des albums et des expositions, son travail – presque chamanique – transfigure une nature magique, mystérieuse, profonde, mais jamais inquiétante.

Pauline Kalioujny dans son atelier de Rémalard dans le Perche. © S. Maurice / aprim

Née d’une mère française et d’un père ukrainien, Pauline Kalioujny oscille entre deux cultures. Depuis la parution de Baba Yaga (2018, Père Castor) et surtout de L’Isba de la mouche (2023, Mango jeunesse), extraits de contes populaires russes, l’autrice s’immerge dans la culture slave, fascinée par les forêts enneigées et les animaux sauvages. « J’ai une relation forte avec la nature depuis mon enfance et j’ai rapidement développé un sentiment d’écoanxiété. La nature est mon refuge et elle me pousse à créer. Il y a quelques années de cela, les gens n’entendaient pas mon message. Aujourd’hui, ça prend une tout autre résonance. »

Construire une œuvre

Pour ses livres, qu’elle décrit comme des « musées portatifs », ou pour son travail plastique brut et sans narration, Pauline Kalioujny utilise plusieurs techniques, mais sa préférée reste la linogravure, qu’elle a choisie pour canaliser son énergie créative. « En passant par la gravure, j’ai dû réduire ma palette de couleurs et travailler posément en faisant une chose après l’autre : creuser le linoléum à la gouge, encrer la matrice, presser la feuille, renouveler l’opération pour chaque couleur… Cette contrainte a forgé mon style. »

L’artiste réserve cette technique pour les éditeurs qui l’accompagnent sur des projets consistants. « La gravure, c’est une forme de résistance. C’est devenu politique de faire une image à la main. Mes livres ne sont pas des images à consommer et à jeter, ils doivent imprimer la rétine des lecteurs. »

Une planche se révèle sous la presse lino. © S. Maurice / aprim

Si un projet pour les adultes commence à mûrir, Pauline Kalioujny s’adresse par prédilection aux tout petits enfants. « C’est un âge métaphysique, ils s’intéressent à tout et sont hypersensibles aux images gravées. Mais on a une responsabilité quand on donne des livres aux enfants. C’est une nourriture artistique et culturelle. Je veux que ça tienne la route et que ça fasse du bien. »

Creusée à la gouge, la plaque de linoléum sera enduite d’encre pour reporter la couleur sur le papier. © S. Maurice / aprim

En 2024, Pauline Kalioujny bénéficie du soutien de Normandie Livre & Lecture qui finance sa participation en tant que marraine au dispositif Un voyage à Bologne.

Stéphane Maurice / aprim

Bio express 

  • 1983 Naissance à Paris
  • 2002-2008 Diplôme de l’École nationale supérieure des arts décoratifs de Paris. Suivi d’une licence d’art graphique et direction artistique à l’ESAG Penninghen.
  • 2004 Voyage initiatique Moscou-Pékin : « La découverte d’un pays fantasmé et un shoot d’énergie à l’arrivée. »
  • 2009 Premier livre édité : Une touche de couleurs, HongFei Cultures
  • 2014 Rencontre avec les éditions Thierry Magnier : « Je trouve mon langage graphique. »
  • 2018 Grand prix d’illustration du MIJ de Moulins. « J’entre dans la cour des grands. »
  • 2023 Installation en Normandie. « J’y trouve mon ancrage. »

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