Une résidence littéraire entre mer et matière avec Mélanie Leblanc

Publié le 03/11/2025
Temps de lecture : 5mn
Mélanie Leblanc, poétesse, écrit des livres et s’adonne aussi à la poésie hors du livre : dans la rue, dans la nature et sur différents supports. Elle commence toutes ses journées par écrire un poème dans de grands carnets en liège écrits à la main. Dernièrement, elle a fait voyager ses carnets d’écriture à Regnéville-sur-Mer (50), le temps d’une résidence de création aux Fours à Chaux, pour poursuivre son projet intitulé « Dans mes mains ce matin ».  Retour sur cette pause créative et iodée qui s’est achevée le 17 octobre. 
© Les Fours à Chaux 

En préambule, pourriez-vous, en quelques lignes, vous présenter et rappeler le sujet du projet d’écriture que vous avez commencé ou poursuivi en résidence ?   

Je suis publiée dans des maisons d’édition de poésie, certaines historiques comme le Castor astral et Cheyne éditeur, et puis une très atypique avec qui j’ai publié 7 livres, les Venterniers. C’est une maison d’édition artisanale, chaque livre est fait à la main, numéroté et daté, tout en étant très accessible au grand public. J’aime penser le livre-objet et aussi la poésie hors du livre, ce qui se traduit de façon plastique (poèmes in situ, expositions) et sonore. L’aspect sonore est ce que je suis venue approfondir aux Fours à chaux, ainsi que le spectacle vivant, à travers un projet intitulé « Dans mes mains ce matin ». Il s’appuie sur les textes que j’écris le matin en suivant un protocole précis. J’en ai fait un podcast et je réfléchis à son adaptation au théâtre.

Pourquoi avoir choisi ce lieu de résidence ?  

Je suis déjà venue aux Fours à Chaux en 2021 et j’avais adoré, à la fois le cadre, les rencontres humaines, la nourriture, le vivant tout autour avec les veaux au lever du soleil et la mer au coucher du soleil. C’est aussi là que j’ai commencé ma pratique d’écriture matinale, cela faisait donc sens de revenir où le projet était né. 

Qu’est-ce que vous appréciez le plus dans le fait d’être en résidence ? 

Être complètement dégagée des contingences matérielles, me sentir autorisée à pouvoir me consacrer entièrement à la création. J’apprécie beaucoup aussi les rencontres artistiques avec des personnes pratiquant d’autres disciplines que la mienne. 

Comment votre résidence vous a aidé dans votre projet d’écriture ? Aviez-vous des doutes sur votre projet qui ont pu être résolus pendant cette période ?  

J’avais d’énormes peurs dans le fait de rendre publics ces textes écrits au réveil. En effet, cela ne correspond pas à ce que j’écris habituellement, ce sont en quelque sorte des visions puis des voix que j’entends, celles d’un collectif, qui s’adresse à moi et aux autres. Je savais donc que je devais partager ces textes, mais j’avais très peur qu’on me prenne pour une folle !  Le simple fait d’avoir été retenue pour ce projet me soutient beaucoup, et puis je suis amenée à en parler, en atelier, lors du jeudi des thés et avec mes partenaires de résidence. Comme je suis d’abord venue pour deux semaines, cela m’a donné une dead-line salvatrice : je devais avoir lancé mon podcast avant la fin de ces deux semaines. Ce que j’ai fait, Dans mes mains ce matin est sorti le 4 septembre.

Pourriez-vous décrire une rencontre ou un moment fort de votre résidence ? 

J’ai été bouleversée par le tout dernier texte de Thibaut Galis, dont j’ai été la première lectrice. Juste après cette lecture, j’ai assisté à la générale avec sa troupe : après avoir pleuré, j’ai vraiment ri, cela a représenté beaucoup d’émotions en peu de temps ! 

Je me souviendrai toujours aussi de ce soir de septembre où je suis allée me baigner à la tombée de la nuit, après une journée enfermée à écrire. Comme la plage était déserte, je me suis baignée nue, mais en sortant de l’eau la nuit était tombée, impossible de retrouver mes affaires qui se confondaient avec les tas d’algues, et la marée montait, montait… J’ai bien ri de moi une fois habillée !  

Quelle suite pour votre projet d’écriture ?   

Le podcast est lancé à raison d’un épisode par jour ; j’écris sous ce format depuis plus de 3 ans et je continue chaque matin, j’ai donc plus de mille textes en réserve. Comme l’enregistrement, le montage et le travail éditorial prennent du temps, je vais peut-être passer à un jour sur deux.  

Je ne sais pas si la publication papier est une bonne idée pour ce texte, j’ai choisi la publication sous forme de podcast car l’oralité me semblait plus adaptée.  

J’espère trouver une compagnie pour mettre en scène une partie de ces textes. Je prépare actuellement une sélection qui forme un ensemble cohérent. Je pense notamment au théâtre d’objet, puisque d’abord apparaissent des objets, des plantes, des animaux ou des scènes dans mes mains, à partir desquels naissent les textes. 

Propos recueillis par Cindy Mahout  

Ce projet a bénéficié d’un soutien de la DRAC de Normandie, de la Région Normandie et du CNL au titre du FADEL Normandie.

Retrouvez d’autres retours d’auteurs et autrices qui ont participé à des résidences d’écriture en Normandie sur le site terre-ecriture.normandielivre.fr

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