Françoise Sagan et la Normandie : une histoire d’attachements
Surnommée par François Mauriac « le charmant petit monstre », Françoise Sagan a inscrit son destin dans le paysage normand.

Un premier fil : Marcel Proust
De son vrai nom Françoise Quoirez, la romancière choisit pour pseudonyme le nom de « Sagan », directement emprunté à l’un des personnages de À la recherche du temps perdu de Marcel Proust. Or, Proust lui-même trouva longtemps refuge à Cabourg. Ce premier lien littéraire tisse, en filigrane, une résonance intime entre l’écrivaine et la Normandie.
Équemauville et la légende du chiffre huit
À l’été 1959, Sagan pose ses valises à Équemauville, près d’Honfleur. Elle y loue pour un mois le Manoir du Breuil. L’histoire, devenue légende, est restée célèbre : le 8 août, au casino de Deauville, elle mise tout sur le chiffre huit et décroche huit millions d’anciens francs. Le lendemain matin, le propriétaire du manoir lui en propose la vente… pour huit millions. Sagan achète.
Ce lieu deviendra son port d’attache. Dès les années 1960, elle s’y ressource, écrit et reçoit. Autour d’elle gravitent Juliette Gréco, Barbara, Jacques Chazot et tant d’autres figures de sa « bande ». Malgré les difficultés financières qui jalonneront sa vie, elle conservera toujours cette maison-refuge. Elle y séjourne encore, peu avant son décès, le 24 septembre 2004, à l’hôpital d’Honfleur.
Deauville, territoire des passions
Deauville fut son autre scène privilégiée : les courses, le poney club, la plage en automne, mais aussi le casino et les nuits festives. Sagan aimait cette atmosphère, entre élégance et insouciance, entre tumulte et apaisement.
Le Bar du Soleil, sur les Planches, porte aujourd’hui une plaque en son hommage : on y retrouve son image, allongée sur le sable, un livre à la main.
Pendant plus de quarante ans, elle écrira depuis ce rivage familier. Son œuvre porte quelques traces modestes de ce long séjour de la romancière, à découvrir dans notre exposition en ligne « Françoise Sagan et Deauville, une écrivaine et son miroir ».
Résonances contemporaines
C’est cette empreinte qu’explore Normandie, terre d’écriture, en faisant dialoguer patrimoine et création d’aujourd’hui. L’auteur Benoît Lemmenais et l’artiste sonore Charlotte Rousseau (Les vies possibles) proposent ainsi cinq cartes postales sonores inspirées de Toxique. Publié en 1964, ce texte singulier raconte la cure de désintoxication du Palafium, dérivé morphinique, prescrit à Sagan après son accident de voiture. Avec 875, ils redonnent voix et matière à cette écriture fiévreuse, qui oscille entre fragilité, lucidité et fulgurance. Un écho vibrant à l’éternelle actualité de Sagan.
Sophie Noël
Pour aller plus loin
Découvrez l’exposition virtuelle Françoise Sagan sur le site Normandie Terre d’écriture