À l’Imec, Lucie Baratte esquisse son troisième roman

Publié le 24/09/2025
Temps de lecture : 6mn
Après deux romans remarqués, Lucie Baratte a investi l’Imec dans le Calvados pour développer un projet épistolaire audacieux, fantastique et teinté de rouge, du 15 avril au 19 juillet 2025.
Arrivée de Lucie Baratte © IMEC – Annie-Rose Pichonnier

Pourriez-vous, en quelques lignes, vous présenter et rappeler le sujet du projet d’écriture que vous avez commencé ou poursuivi en résidence ?   

Je suis l’autrice de deux romans, parus aux éditions du typhon : Le chien noir (2020) et Roman de Ronce et d’Épine (2024). J’ai également publié un récit autobiographique, Looking for Janis, en 2016 et un hommage à Marie-Catherine d’Aulnoy, La dame aux étoiles, aux éditions Méli-Mélo en 2024.  

Par ailleurs, je suis designer graphique et typographe de métier et j’enseigne la sémiologie et la typographie en études supérieures d’art.  

Je travaille actuellement à mon troisième roman. Je poursuis mon exploration du genre fantastique, en investissant, cette fois-ci, la forme épistolaire. J’avais modelé Le chien noir à partir d’une palette de ténèbres et Roman de Ronce et d’Épine d’une foisonnante forêt de verts. Mon prochain roman sera imprégné de rouge. 

Pourquoi avoir choisi ce lieu de résidence ?  

J’ai eu la chance de passer trois jours à l’Imec en 2007 à l’occasion d’un colloque autour de la typographie et du livre organisé par Sébastien Morlighem avec l’école Estienne. Nous avions visité la bibliothèque et les archives, nous avions écouté de passionnantes conférences dans la grange et partagé des repas animés. J’avais été profondément émerveillée et inspirée par ce lieu. Ma passion pour l’abbaye d’Ardenne n’a pas faibli depuis. 

Faire une résidence à l’Imec était pour moi un rêve ! 

Qu’est-ce que vous appréciez le plus dans le fait d’être en résidence ? 

Écrire un roman est une activité ardue, bien que plaisante, qui demande beaucoup de soi. Le soutien financier et matériel apporté par la résidence permet d’alléger ce poids de la création et d’ouvrir à plus de sérénité. Grâce à cela, et au fait d’être en dehors de mon lieu de travail habituel pour une longue plage de temps, je peux m’immerger dans l’écriture de mon roman, prendre de profondes inspirations et souffler. Ça facilite considérablement l’avancement. 

Comment votre résidence vous a aidé dans votre projet d’écriture ? Aviez-vous des appréhensions ou des doutes sur votre projet qui ont pu être résolus pendant cette période ?  

Une des ressources les plus fabuleuses de l’Imec (outre ses archives, ses jardins et sa cantine…) est sa bibliothèque : j’ai pu y emprunter des livres et des revues qui m’ont fait gagner un temps fou dans mes recherches.  

La résidence m’a aidée à mettre en route une régularité de travail. Démarrage, prise en main de la boîte de vitesse, moteur qui ronronne, et c’est parti ! Certains jours, j’ai parcouru des pays entiers, d’autres, je suis restée bloquée au péage… 

Fort heureusement, la résidence a aussi été un temps de rencontres avec d’autres auteur.ice.s plus confirmé.e.s que moi. Nos échanges m’ont permis de relativiser et de reprendre confiance en moi dans le processus d’écriture. J’ai beaucoup aimé partager mes repas avec les chercheur.se.s et auteur.ice.s de passage à l’Imec : nous avons lié connaissance, parfois même amitié, nous nous sommes confiés sur nos difficultés, nos parcours, nos projets, nous avons eu des discussions passionnées, nous avons beaucoup ri…    

© Lucie Baratte

Pourriez-vous décrire une rencontre ou un moment fort de votre résidence ? 

La réponse est très difficile car il y en eu tant !  

Des rencontres avec des personnes d’une grande richesse, intellectuelle et humaine. Des rencontres avec des livres qui ont nourri ma sensibilité et aiguisé ma pensée. J’en ressors fortifiée et reconnaissante. Le cœur plein de visages et de mots. 

Si toutefois je devais citer un moment fort en particulier, je vous parlerais de ma rencontre avec Michel Zink dans le cadre du festival Époque. Imaginez-vous, jeune soprano invitée à chanter en duo sur la scène d’un opéra brillant avec le meilleur ténor de ces dernières décennies. Imaginez-vous que vous ayez appris votre art en admirant le sien, que sa voix ait bercé votre désir de chanter, que vous vous soyez appuyée sur son talent et sa passion à lui pour construire votre propre répertoire. Et imaginez alors que le moment venu de la rencontre, le grand ténor vous adresse un geste tendre, tout en humilité, et vous félicite pour votre travail…  

Les mots me manquent encore. Ils sont trop petits pour dire la joie, la gratitude et le bonheur. 

Je sais d’ores et déjà que ce moment est et sera pour toujours un des plus beaux, un des plus vrais, de mon existence.   

Quelle suite pour votre projet d’écriture ? 

De retour chez moi, je vais reprendre l’astreinte hebdomadaire, voire quotidienne, qui m’est nécessaire pour poursuivre l’écriture de mon roman. Je vais remettre en place un mouvement de balancier régulier pour approfondir encore, à raison de micros-objectifs successifs. Je vais continuer à y penser tous les soirs en m’endormant, à prendre des notes sans arrêt, à raffiner l’émotion. Je vais continuer, continuer, continuer.  

À ce rythme, je peux espérer avoir fini mon manuscrit dans un an.   

Propos recueillis par Mylène Heigeas

Ce projet a bénéficié d’un soutien de la DRAC de Normandie, de la Région Normandie et du CNL au titre du FADEL Normandie. 

Retrouvez d’autres retours d’auteurs et autrices qui ont participé à des résidences d’écriture en Normandie sur le site terre-ecriture.normandielivre.fr

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