Archives des Perluète #01 - Perluète https://perluete.normandielivre.fr/category/perluete-01/ La revue littéraire de Normandie livre & lecture Fri, 15 Oct 2021 12:09:23 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.2.4 https://perluete.fr/archives_00-14/wp-content/uploads/2020/08/cropped-200_2006-1-32x32.png Archives des Perluète #01 - Perluète https://perluete.normandielivre.fr/category/perluete-01/ 32 32 153862814 [L’invitée] Julie Douard – Les mots ont la parole https://perluete.normandielivre.fr/les-mots-ont-la-parole/ Mon, 07 Jan 2019 15:48:05 +0000 https://perluete.normandielivre.fr/?p=66 Julie Douard  a publié en avril La Chair des vivants (P.O.L). Un troisième opus où la romancière délivre le même plaisir à faire vivre des personnages à la présence sonore palpable. Elle nous dit ce que le verbe écrire signifie pour elle, et quels sont les noms que porte celui qui, dans son dialogue avec la page blanche, s’extrait du monde pour mieux nous le restituer.

L’article [L’invitée] Julie Douard – Les mots ont la parole est apparu en premier sur Perluète.

]]>

Julie Douard a publié en avril La Chair des vivants (P.O.L). Un troisième opus où la romancière délivre le même plaisir à faire vivre des personnages à la présence sonore palpable. Elle nous dit ce que le verbe écrire signifie pour elle, et quels sont les noms que porte celui qui, dans son dialogue avec la page blanche, s’extrait du monde pour mieux nous le restituer.

"La romancière parle ses livres"

Bio express - Julie Douard

Après deux romans remarqués, Après l’enfance (2010) et Usage communal du corps féminin (2014), publiés chez P.O.L, Julie Douard a fait paraître en avril dernier, chez le même éditeur, La Chair des vivants. Elle enseigne la philosophie depuis plusieurs années en lycée.

Rencontrer Julie Douard après qu’on a eu lu ses romans, c’est vivre l’expérience d’une confirmation : c’est bien elle. Ce timbre de voix, cette franchise du geste et de la phrase, cette aisance du verbe, facile, comme on le dit des funambules qui semblent se jouer de la corde d’acier sur quoi ils virent et voltent : c’est elle. On dirait volontiers de ses romans qu’ils se lisent à haute voix. La romancière parle ses livres, fait sonner les paroles des personnages, et les Henri, les François, les Marie Marron ou Gustave Machin acquièrent une présence sonore palpable. Cette comédie humaine, petit manège au pays des gens moyens – Michon aurait dit « des vies minuscules » –, est éminemment théâtrale. Julie Douard, dès sa vie de lycéenne et d’étudiante, a écrit des pièces, jouées et montées. La romancière a conservé, dans le phrasé de ses histoires, la mélodie de la scène, le drama des situations et des péripéties, le claquement de la réplique qui fait punch. Elle le dit dans un franc sourire, mais oui, évidemment, elle aime Jacqueline Maillan et Blanche Gardin.

La Chair des vivants se donne comme un texte de l’inconvention. Risquons le néologisme pour nommer un roman à la fois fort peu conventionnel et délibérément inconvenant. À l’heure où le ton est donné par le sentimentalo-parisien suant le feel good, ou à l’opposé par le trash de l’autofiction, Julie Douard prend des chemins moins balisés. Elle conjugue la farce et la fable. La farce, parce qu’il faut rire du monde, si on veut le bien dire. Dans la tradition des ironistes, de Rabelais à Swift, de Sterne à Kundera, qui font entendre la petite musique de la mise en question, acide et dérangeante. Douard nous montre une petite entreprise où la seule crise, molle et banale, est la médiocrité. Henri le faux winner, Michel le tyranneau de bureau, Michon le vilain vraiment pas beau. On les connaît, mais grâce à la romancière on va les reconnaître. Ils pataugent, ludions dérisoires, dans un quotidien plan-plan. Par la grâce du roman, il leur arrivera quelque chose, un lien, un je-ne-sais-quoi qui les transformera…

Farce, parce que l’humour est constant, sans quoi la vie serait une erreur. Julie Douard aime le zeugma, parce que l’alliance des insolites crée un saugrenu qui dévoile l’autre côté du miroir.

Et fable, parce que la littérature est un chemin de connaissance. Julie Douard, professeur de philo à Bayeux, se garde bien de barder de concepts ou de larder de notions ses récits aériens. La philosophie est ce qui reste à penser quand le livre est fini. Quelle liberté est la nôtre ? De quels déterminismes suis-je le jouet ? Qui subit, qui choisit ? Le texte est ouvert, offert à ce point d’orgue qui est le signe, comme le voulait Platon, de la vie examinée.

Des projets ? On n’en saura rien, et tant mieux. Janvier et sa rentrée littéraire ? Julie regarde l’événement avec autant d’intérêt que de détachement. Elle sait l’effervescence des maisons d’édition, le branle-bas des étals de libraires, la cohue des auteurs dans les médias. Ainsi va la vie du livre, tout auteur se réjouit de cette belle vitalité… Une dernière confidence : la naissance du roman. Ni plan bien conçu, ni personnage phare, ni thèse installée : Julie Douard laisse faire les mots. Une phrase lui vient, comme s’invite un ami, s’impose et s’écrit (crayon ou ordi, tout lui va). C’est le sésame. C’est la clef, l’affaire est lancée. La page va se dérouler, comme se gonfle en congère la boule de neige première, cueillie du poing au bord du chemin. Et le livre se fera, de scène en acte, de personnages en situations, de répliques en trouvailles. Cela va prendre force et forme, s’exprimer, se dilater, vivre sa vie de livre. Il faudra un titre à cet enfant du démiurge, un titre qui dise sa geste et sa gestation. La Chair des vivants : pas mal, pour une couverture. Lettres bleues sur fond blanc.

Franck Lanot

Interview vidéo de Julie Douard

L’article [L’invitée] Julie Douard – Les mots ont la parole est apparu en premier sur Perluète.

]]>
66
[Dossier] Septembre en hiver ? https://perluete.normandielivre.fr/dossier-la-rentree-litteraire-de-janvier-en-normandie/ Mon, 07 Jan 2019 15:45:39 +0000 https://perluete.normandielivre.fr/?p=74 L’écart se resserre. Avec 493 titres à paraître en janvier-février 2019, la rentrée littéraire d’hiver pèse presque aussi lourd que celle de septembre sur les tables des libraires. Elle a changé de dimension, personne ne le conteste. Pour le reste, elle inspire aux acteurs du livre des commentaires et des approches différentes, de l’enthousiasme à la défiance.

L’article [Dossier] Septembre en hiver ? est apparu en premier sur Perluète.

]]>

Janvier n’est plus la « petite » rentrée littéraire d’il y a dix ans.

Si septembre reste la « grande » – celle des prix littéraires et de leurs enjeux –, le début d’année et ses 493 romans annoncés sont-ils devenus un « septembre bis » ?
L’avis des acteurs de la filière donne la température.
L’hiver semble de plus en plus chaud.

Laurent Cauville

© Alice Dufay

L’écart se resserre. Avec 493 titres à paraître en janvier-février 2019, la rentrée littéraire d’hiver pèse presque aussi lourd que celle de septembre sur les tables des libraires. Elle a changé de dimension, personne ne le conteste. Pour le reste, elle inspire aux acteurs du livre des commentaires et des approches différentes, de l’enthousiasme à la défiance. « C’est devenu un moment important, avec un réel impact sur l’activité, jauge sans hésiter Nicolas Coulmain (librairie Guillaume, à Caen). Même s’ils nous questionnent moins qu’en septembre, nos lecteurs se connectent à cette nouvelle actu, l’attrait des nouveautés est réel. Et d’un point de vue éditorial, janvier me semble plus exigeant, les prix ne sont plus là pour brider les éditeurs. » Valérie Barbe (Le Brouillon de culture, à Caen) abonde : « C’est une rentrée plutôt qualitative. Les éditeurs ont tendance à garder pour janvier des manuscrits auxquels ils tiennent. »

Délestée de la pression des prix littéraires, cette nouvelle vague en début d’année serait-elle donc plus propice à la prise de risque, côté éditeurs ? Pas si sûr. Les auteurs reconnus n’hibernent pas, janvier leur offrirait même une nouvelle fenêtre de visibilité. L’an dernier, Pierre Lemaître, Olivier Adam ou Elena Ferrante ont occupé le terrain. En 2019, c’est la locomotive Houellebecq, nimbée de tout son mystère, mais aussi Tahar Ben Jelloun, Antoine Volodine ou Muriel Barbery qui feront le buzz. « Les éditeurs ne favorisent pas les primo-écrivains en janvier, sauf coup de cœur énorme », estime Valérie Barbe. « Les auteurs reconnus sont des accélérateurs, dit Nicolas Coulmain. En janvier 2018, le Lemaître (Couleurs de l’incendie) a fait chez nous en un mois les deux tiers des ventes du Zeniter (L’Art de perdre) sur quatre mois. »
Une « best-sellerisation » juste après les fêtes qui fait dire à Manuel Hirbec (La Buissonnière, à Yvetot) que « si tout devient rentrée littéraire, il n’y a plus de rentrée littéraire. Dans ce cas, on peut dire la même chose du printemps. La vraie rentrée littéraire, c’est pour moi celle de septembre. »

Janvier fait débat sur un critère lancinant : la disponibilité.

Préparer le flot hivernal s’avère une vraie gageure pour des libraires, très occupés depuis l’été (voir encadré). « Nous lisons davantage pour septembre, tandis que notre temps est compté en novembre et décembre », explique Nicolas Coulmain. Manuel Hirbec confirme : « Je prépare septembre avec mes clients, ils lisent les livres, viennent les présenter. Nous rencontrons des auteurs… En janvier, c’est différent, les services de presse des éditeurs sont moins actifs. Ces derniers ne peuvent pas préparer autant la rentrée de janvier. » Les médias auraient-ils plus d’impact sur la décision d’achat à ce moment de l’année ? Valérie Barbe constate qu’en janvier « les coups de cœur de certains gros médias comme Télérama, ou Les Inrocks vont être très suivis par la clientèle. »

Reste qu’un temps fort comme celui-là, même noyauté par le tout-puissant marketing, impulse une dynamique de fréquentation des lieux de vente et donne l’occasion aux libraires de tisser une relation avec les lecteurs. « C’est la possibilité aussi de leur montrer notre indépendance en nous démarquant de cette actualité chargée », pense Nicolas Coulmain, qui a fait le choix l’an passé, avec son équipe, d’inviter entre janvier et avril des auteurs hors rentrée, « juste parce que nous les aimons et avons envie de partager ça avec le public. Ce sont des moments plus intemporels, autour d’une œuvre et d’un parcours, plus que d’un livre. L’an dernier nous avons accueilli ainsi Olivier Rolin et Jean Echenoz. C’était magique. Nous allons poursuivre.»

Septembre vs janvier

567 parutions en septembre 2018 /

500 en janvier 2018

 

Le roman en tête

111 millions d’exemplaires vendus en 2017 (1er genre en France)

10 000 titres par an

publiés en France

 

33 ans

C’est le temps qu’il faudrait à un lecteur moyen en France (15 livres par an), pour avaler les 500 romans de la rentrée de janvier 2018 (source Les Décodeurs / Le Monde)

Côté libraires

Une rentrée de septembre préparée dès le printemps, un mois de décembre dans les papiers cadeau… La vague de parutions de janvier cueille des libraires souvent fatigués par l’intensité du semestre écoulé.

« Elle nous essouffle un peu, cette rentrée d’hiver. Pour l’accompagner, il faut être capable d’avoir lu beaucoup. Or, les services de presse arrivent tard, en novembre, ce qui nous laisse peu de temps et nous oblige à lire de manière moins approfondie, parfois partiellement, alors que pour septembre on emporte chacun une quinzaine de livres en vacances d’été. »

Nicolas Coulmain (Librairie Guillaume / Caen)

« D’août à février, on ne voit pas le jour, mais le libraire sait nager en eaux profondes. On sait qu’on a plusieurs mois de lecture, alors nous nous partageons les ouvrages selon nos goûts. Pour les livres, on a toujours de l’énergie. Et puis en janvier, pas de rentrée scolaire et universitaire à gérer. »

Valérie Barbe (Le Brouillon de Culture / Caen)

© Aprim

« C’est très chargé de mai à décembre. Nous retenons déjà 55 titres dans notre catalogue de septembre, c’est dire la quantité de livres que nous lisons. Pour “la rentrée de janvier”, impossible de lire autant. »

Manuel Hirbec (La Buissonnière / Yvetot)

Côté éditeurs

« Pas pour nous »

« La notion de rentrée littéraire n’a pas grand sens pour nous. C’est une création des grandes maisons, à vocation plutôt commerciale. Publier lors de ces rentrées fait perdre de la visibilité aux petites maisons. Je ne pense pas que la rentrée de janvier soit une opportunité pour les petits éditeurs indépendants qui, de plus, ne bénéficient pas de moyens de communication suffisants pour lutter contre les grands.
Notre visibilité se joue en dehors de ces événements, notamment via notre site Web et les réseaux sociaux. Toutes nos publications figurent sur notre site et dès qu’un titre est publié, nous informons via Facebook et par mail tous ceux qui nous suivent. Et bien sûr, nous sommes sur le terrain dès que possible, pour des lectures ou des salons. »

Yoland Simon
Éditions de L’Aiguille

« C’est devenu incontournable »

« Oui, janvier est pour nous un rendez-vous incontournable. Pour qui publie de la littérature française et étrangère, faire paraître à cette période est devenu essentiel, même dans un flot important, c’est une belle fenêtre de visibilité, notamment pour les primo-romanciers, comme nous l’avons vu en 2017 avec Bernard Allays pour Le Goût des ruines, qui a fini par décrocher le Prix des grandes écoles en juin dernier. C’est aussi un beau focus sur la littérature étrangère (35 % de notre catalogue). Un ouvrage publié en janvier bénéficiera par ailleurs du millésime 2019 pour toute une année, il gardera plus longtemps son statut de « nouveauté ». Début 2019, nous publions cinq nouveautés, soit plus de la moitié de nos parutions annuelles.
Mais, fort heureusement, on existe aussi le reste du temps, nous sommes des coureurs de fond, avec des livres qui font leur vie sur le long terme, comme le recueil À la pleine lune, de la poétesse syrienne Fadwa Souleimane aujourd’hui disparue, que nous avons publié en 2014 et que nous vendons encore. »

Emmanuelle Moysan
Éditions Le Soupirail
(Le Mesnil-Mauger / Calvados)

Les bibliothécaires regardent septembre

« C’est sur septembre que nous nous appuyons le plus. » Les bibliothécaires que nous avons joints confirment que leurs efforts budgétaires pour commander des ouvrages ou organiser des soirées coups de cœur se concentrent sur la période des prix littéraires.« Chaque année nos lecteurs expriment une grosse attente à cette période, résume Élisabeth Cloarec, à la bibliothèque de Sotteville-lès-Rouen. Nos plus gros achats de l’année ont lieu à ce moment-là. »

« Nous prévoyons un budget spécifique pour une quarantaine de romans de la rentrée de septembre, en plus de nos acquisitions mensuelles courantes », illustre Pascale Navet, à la médiathèque de Saint-Lô. À Vernon, Cathy Pesty parle même de « budget exceptionnel ». La bibliothécaire poursuit : « Notre public me paraît peu sensible à ce qui se passe en janvier, mais nous, professionnels, nous la suivons. » « Elle est même très intéressante, embraye Élisabeth Cloarec, qui trouve à janvier de vraies qualités littéraires, alors qu’en septembre, la course aux prix parasite le niveau d’ensemble. »

Côté programmateurs

« Pas un salon du livre »

« L’actualité de janvier influe peu sur notre programmation. Sur les 20 à 30 auteurs que nous accueillons, peut-être un ou deux noms seront liés à cette rentrée de janvier. D’abord parce qu’il est difficile d’anticiper : les éditeurs ne parlent pas avant octobre de ce qu’ils vont sortir en janvier. Ensuite parce que Le Goût des autres est un festival à thématique. Cette année nous parlerons littérature du voyage (1), avec des auteurs comme Laurent Gaudé, Nicolas Fargue, Catherine Poulain… Nous ne sommes pas un salon du livre. »
(1) Du 17 au 20 janvier 2019.

Serge Roué
Festival Le Goût des autres

« Trop tôt pour les polars »

« Pour le polar, le flot de sorties arrive plutôt un mois ou deux après les rentrées littéraires et beaucoup sortent en début d’année, un peu à contretemps, plutôt vers mars, pour se caler sur le festival Quai du polar de Lyon.
Notre festival Bloody Fleury ayant lieu début février (1), c’est trop tôt pour espérer programmer ces auteurs. La liste de nos invités doit être calée vers avril, dix mois avant l’événement. Nous faisons donc notre marché en octobre ou novembre, pour l’édition qui aura lieu seize mois plus tard. »
(1) Du 1er au 3 février 2019.

Perrine Savary Festival polar Bloody Fleury (Fleury-sur-Orne / Calvados)

Côté auteurs

©Catherine Helie

« Je sortirai au printemps »

Marie Nimier

L’écrivaine normande Prix Médicis en 2004 aime le décalage. Pour la sortie de son prochain livre, elle a délibérément voulu se démarquer de la rentrée d’hiver, à contre-pied de la parution de La Plage (son dernier roman, chez Gallimard), sorti le 7 janvier 2016. Son regard sur la notion de rentrée, en trois questions.

Cette rentrée de janvier, que vous inspire-t-elle ?

En tant que lectrice, je l’attends avec le même appétit qu’en septembre, mais pour des raisons différentes. Septembre, j’y vois l’occasion de faire des découvertes, les éditeurs lancent de nouveaux talents à ce moment-là. Janvier est plutôt un temps de retrouvailles avec des auteurs déjà consacrés.

Et en tant qu’auteur, que vous inspire ce raz-de-marée de livraisons ?

La quantité de parutions interroge, c’est vrai. Juste après septembre, on peut se demander comment les éditeurs font pour bien accompagner leurs auteurs. Moi-même, dans une librairie, je me sens un peu assaillie par la quantité. En même temps, je vois dans cette surproduction un signe de vitalité du livre en France assez réconfortant. Reste que, dans ces périodes de sorties massives, les principaux bénéficiaires sont les auteurs consacrés ou primés. Je crois que c’est de plus en plus difficile pour les autres, en termes de visibilité et de ventes…

« Il y a quelque chose de réjouissant à être un peu hors-piste. »

Cette rentrée a-t-elle un impact sur le calendrier d’écriture ?

Globalement, ce que je retiens des deux rentrées littéraires, c’est que les éditeurs ont tendance à allonger le délai entre livraison du manuscrit et date de sortie. Pour mes livres parus en septembre, je pouvais achever mon manuscrit en mars et les dernières corrections avaient lieu juste avant l’été. Aujourd’hui, il faut plutôt boucler dès janvier pour une sortie en septembre. Pour l’auteur, l’attente est plus longue ; or, ce temps est un entre-deux parfois difficile pour basculer vers un autre projet d’écriture.
C’est justement la place prise par cette rentrée de janvier qui m’a amenée à envisager autrement la sortie de mon prochain livre. J’ai clairement demandé à mon éditeur qu’il paraisse plus tard, loin de l’agitation. Il s’appellera Les Confidences. Ce sera donc un livre de printemps, un projet atypique, différent dans le choix narratif, dans lequel une romancière (qui me ressemble) recueille, les yeux bandés, des confidences d’anonymes, comme des tranches de vie très intimes. C’est un objet d’écriture particulier, un assemblage de monologues qui a nécessité un gros travail d’organisation des récits. Je suis assez heureuse de livrer ce texte au public trois mois après la rentrée de janvier. Il y a quelque chose de réjouissant à être un peu hors-piste.

L’historien aussi ?

L’historien caennais Yves Lecouturier se sent-il concerné par la rentrée de janvier ?
Non, quoique...
« En tant qu’historien, je ne suis pas concerné par les rentrées littéraires. C’est un temps fort pour les romanciers. En tant que programmateur du Salon du livre de Cheux, je jette quand même un œil... Quant à savoir s’il faut en être ou pas, l’auteur n’a pas souvent son mot à dire, c’est avant tout un choix des éditeurs. Pour ce qui est de l’impact, in fine je crois que seuls les auteurs médiatiques en bénéficient, les autres n’arrivant que rarement à sortir de l’anonymat. »

L’article [Dossier] Septembre en hiver ? est apparu en premier sur Perluète.

]]>
74
[Lieux] Ça bouge chez les libraires de Seine-Maritime et de l’Eure ! https://perluete.normandielivre.fr/lieux-ca-bouge-chez-les-libraires-de-seine-maritime-et-de-leure/ Sun, 06 Jan 2019 15:31:56 +0000 https://perluete.normandielivre.fr/?p=761 Alors que les ventes de livres continuent de baisser, ouvrir ou reprendre une librairie reste un pari risqué que certaines n’hésitent pas à faire.

L’article [Lieux] Ça bouge chez les libraires de Seine-Maritime et de l’Eure ! est apparu en premier sur Perluète.

]]>

Alors que les ventes de livres continuent de baisser, ouvrir ou reprendre une librairie reste un pari risqué que certaines n’hésitent pas à faire. Caroline Jacquot et Céline Poret, 40 ans chacune, ont créé leur librairie au Havre et à Cany-Barville (76). L’une, responsable marketing et éditorial à Paris, et l’autre, soignante à l’hôpital de Fécamp, ont décidé de changer de cap. Aidée de Book Conseil, Caroline a bâti son projet au Havre. Profitant des travaux d’aménagement de sa librairie Au Fil des pages durant l’été, elle a multiplié les rencontres avec le milieu culturel local. Ouvert en octobre, son établissement accueille auteurs et animations avec succès. Pour Céline, le souhait d’ouvrir sa librairie Les Accents a été mû par la volonté d’en faire un lieu convivial, accueillant et accessible à tous(1).

C’est aussi ce qui a guidé la création de la librairie associative Les Pépites, à Beuzeville (27). Dans cette jolie maison, on peut acheter des livres et des objets de créateurs de la région, lire en buvant un café ou un thé et en dégustant des pâtisseries maison…

Librairie La Pléiade à Elbeuf
Librairie La Pléiade à Elbeuf
Librairie Les Pépites à Beuzeville
Librairie Les Pépites à Beuzeville

D’autres librairies ont trouvé preneur. C’est l’heureux dénouement qu’a connu L’Oiseau lire, à Évreux, en vente depuis de nombreux mois. Après des initiatives avortées, Annie Falzini s’apprêtait à fermer boutique, lorsque Didier Dupont, libraire BD de la ville, s’est porté acquéreur. La librairie a déménagé, dans la même rue, dans un local clair que colorent les couvertures des albums et livres pour petits et grands. À Rouen, Paul Billington a succédé à Jane Fitte dans la très connue librairie anglaise ABC Bookshop.

Enfin, pour cause de retraite, Olivier Mouette a cédé la place à Coralie Dehondt à La Pléiade à Elbeuf. Il s’agit également d’une reconversion pour Coralie, auparavant cogérante dans une entreprise d’expertise automobile. L’année 2019 s’annonce aussi riche en changements, car deux autres reprises sont en cours !

(1) Ces deux librairies ont été accompagnées par Normandie Livre & Lecture et soutenues par le FADEL.

Librairie Au Grand Nulle Part
Librairie Au Grand Nulle Part

De l’air pour les bulles

Au Grand Nulle Part a changé de visage ! Des travaux ont eu lieu au cours de l’été 2018 (et l’inauguration en septembre), comprenant le rafraîchissement de la façade, le réaménagement intérieur – avec des meubles amovibles pour l’accueil d’auteurs, à hauteur du jeune public, espace lecture et installation de radiateur réversible – pour proposer une plus grande offre au public et développer le rayon jeunesse. Une aide du FADEL et du CNL l’a aidé à réaliser cette transformation.

Sophie Fauché

 

Retour sur les travaux de la librairie Au Grand Nulle Part avec Fred Sendon, le responsable

L’article [Lieux] Ça bouge chez les libraires de Seine-Maritime et de l’Eure ! est apparu en premier sur Perluète.

]]>
761
[Lieux] Métro biblio dodo : lieux de vie https://perluete.normandielivre.fr/lieux-metro-biblio-dodo-lieux-de-vie/ Sat, 05 Jan 2019 15:31:45 +0000 https://perluete.normandielivre.fr/?p=778 Quel est le point commun entre Lisieux, Saint-Lô et Bayeux ? Toutes trois ont œuvré à la rénovation ou à la création de bibliothèques lieux de vie, tel que le définit Ray Oldenburg, sociologue urbaniste américain.

L’article [Lieux] Métro biblio dodo : lieux de vie est apparu en premier sur Perluète.

]]>
Photo de la médiathèque de Lisieux
Médiathèque de Lisieux. Les médiathèques sont repensées pour devenir des tiers-lieux. Exemple à Lisieux, où les nouveaux espaces de la médiathèque André-Malraux ont été imaginés pour en faire un véritable lieu de vie pour les publics.

Quel est le point commun entre Lisieux, Saint-Lô et Bayeux ? Toutes trois ont œuvré à la rénovation ou à la création de bibliothèques lieux de vie, tel que le définit Ray Oldenburg, sociologue urbaniste américain.

Le 28 septembre 2018, la médiathèque André-Malraux, « tête de réseau » de la lecture publique à Lisieux, a rouvert ses portes après un an de travaux. Parmi les nouveautés, la réorganisation des collections par pôles thématiques, une ouverture le dimanche après-midi, l’automatisation du prêt. À souligner : le réaménagement du hall afin de pouvoir proposer une sélection de nouveautés et fonctionner de façon autonome sur des horaires élargis. De quoi remplir l’objectif de « projeter la médiathèque dans l’ère numérique et la conforter en lieu de vie accessible » rayonnant à l’échelle intercommunale !

Même ambition affichée pour Saint-Lô, où « le projet de rénovation complète de la médiathèque vise à en faire un outil de développement culturel, en lien avec les partenaires du territoire, ainsi qu’un lieu de vie, de convivialité : on pourra y travailler, apprendre, mais aussi jouer, se détendre, se reposer ». Quelque 18 mois de travaux sont nécessaires. L’entrée dans les lieux se fera désormais au rez-de-chaussée, qui proposera un espace café/presse, et des salons de lecture seront disséminés dans l’ensemble du bâtiment. Parallèlement, l’offre numérique sera développée et le site Internet de la bibliothèque fera peau neuve. Il reste à patienter jusqu’au printemps pour découvrir le résultat…

Enfin, le dernier né des projets sortira de terre à Bayeux, début 2019, avec une médiathèque désormais intercommunale. De nouveaux espaces y feront leur apparition, avec un café en libre-service, un espace jeux vidéo, un « lab » pouvant accueillir des ateliers pratiques, un jardin intérieur, une salle de représentation et une galerie d’exposition. Là aussi, l’accueil du public a été repensé avec des horaires d’ouverture augmentés, des ressources numériques accessibles à distance, des instruments de musique empruntables et bien d’autres réjouissances au programme des « 7 Lieux » !

Séverine Garnier

L’article [Lieux] Métro biblio dodo : lieux de vie est apparu en premier sur Perluète.

]]>
778
[Patrimoine] Redescendre aux enfers https://perluete.normandielivre.fr/patrimoine-redescendre-aux-enfers/ Sun, 30 Dec 2018 15:25:26 +0000 https://perluete.normandielivre.fr/?p=99 Si curieux que cela paraisse, on doit à l’abbé Grégoire la paternité lointaine de l’enfer, pour avoir, à des fins pédagogiques, plaidé la conservation de quelques exemplaires des livres interdits pour immoralité par la justice, comme on rassemble des poisons dans les cabinets d’histoire naturelle. Il ne s’agissait donc pas de flatter les penchants pervers de quelques lecteurs avertis, mais de rassembler du matériau pour apprécier après coup, par les preuves de son contraire, la qualité morale d’une époque.

L’article [Patrimoine] Redescendre aux enfers est apparu en premier sur Perluète.

]]>

L’enfer a-t-il vécu ? Celui de la Bibliothèque nationale avait pourtant construit sa légende et s’était fait quelques émules. Jusqu’en 1969 – admirons l’à-propos – date à laquelle fut close la cote « enfer ». Après les débordements de l’année précédente, les bonnes mœurs n’avaient plus assez de crédit pour que ces ouvrages licencieux leur fussent contraires.

Par Bernard Huchet, conservateur de bibliothèque

L’Arétin d’Augustin Carrache, ou Recueil de postures érotiques, d’après les gravures à l’eau-forte par cet artiste célèbre, avec le texte explicatif des sujets, la Nouvelle Cythère [i.e. Paris, Pierre Didot, 1798]. Bibliothèque nationale de France, département Réserve des livres rares, SMITH LESOUEF E-4
Si curieux que cela paraisse, on doit à l’abbé Grégoire la paternité lointaine de l’enfer, pour avoir, à des fins pédagogiques, plaidé la conservation de quelques exemplaires des livres interdits pour immoralité par la justice, comme on rassemble des poisons dans les cabinets d’histoire naturelle. Il ne s’agissait donc pas de flatter les penchants pervers de quelques lecteurs avertis, mais de rassembler du matériau pour apprécier après coup, par les preuves de son contraire, la qualité morale d’une époque.

Apparu progressivement dans la première moitié du XIXe siècle, ce classement dans l’enfer ne visait pas seulement des livres condamnés, mais aussi tous ceux « dont on pense que la lecture est dangereuse », regroupés dans un « endroit fermé », comme le dit le grand Larousse en 1870. C’est l’occasion d’explorer deux évidences dont nos convictions collectives ne reconnaissent plus guère aujourd’hui le premier degré : d’une part, qu’il est de la mission des bibliothécaires d’exercer à leur guise une police des mœurs, et d’interdire aux lecteurs, pour ce motif, l’accès à certaines collections ; d’autre part, qu’il est judicieux de conserver sur place à d’autres fins que la consultation, dans un local sérieusement verrouillé, des ouvrages pouvant nuire à l’orthodoxie de la pensée, voire à l’ordre public.

Une fascination pour l’obscène

C’est ce paradoxe – on condamne, mais on conserve – qui donne tout son charme à l’enfer, et fait déplorer qu’on soit dispensé d’en constituer encore aujourd’hui. Il implique l’intervention d’un arbitraire local, avec un droit personnel de censure à l’encontre d’œuvres qu’il considère comme licencieuses. Mais cette licence elle-même, et le jugement qu’elle provoque, sont définis par une société dont ils constituent l’envers, et donc le révélateur profond. D’ailleurs, les fantasmes que provoque dans le public d’un établissement l’existence d’un enfer sont significatifs et souvent dépassent de beaucoup l’ignominie véritable des collections en cause. Car il existe une fascination permanente pour l’obscène, quand même elle se déguise en intérêt souriant pour le pittoresque langagier de la pornographie : Les Délices du cloître, Le Chatouilleur des dames, Serrefesse ou le Bordel apostolique recevaient ainsi des succès d’estime qu’une lecture attentive n’aurait peut-être pas confirmés.

De l’avantage de l’enfer…

Mais notre époque voit aussi fleurir des romans explicites qui n’ont pas de points à rendre à leurs prédécesseurs. Les acquérir et les classer dans un nouvel enfer valoriserait leur existence, et rendrait hommage au pluralisme littéraire dont ils sont les témoins éloquents, même condamnés ou méprisés. S’il est vrai, comme l’affirmait Jean-Jacques Pauvert, qu’il n’est pas d’œuvres « mais seulement des lectures érotiques », dont la responsabilité n’incomberait pas moins au lecteur qu’à l’auteur, une bibliothèque publique ne devrait pas s’affranchir des missions d’éducation esquissées voici deux siècles par l’abbé Grégoire, et priver son public d’expérimenter les troubles et les frissons de l’interdit. Constituer un enfer, et l’enrichir avec assez d’humour et de pertinence, aurait ainsi l’avantage de manifester qu’au lieu du déferlement vulgaire et sans aveu de la pornographie numérique, il reste encore en littérature, comme dans la vie, d’autres bastilles à prendre et d’enivrantes libertés à conquérir.

L’Arétin d’Augustin Carrache, ou Recueil de postures érotiques, d’après les gravures à l’eau-forte par cet artiste célèbre, avec le texte explicatif des sujets, la Nouvelle Cythère [i.e. Paris, Pierre Didot, 1798]. Bibliothèque nationale de France, département Réserve des livres rares, SMITH LESOUEF E-4
Argens, Jean-Baptiste de Boyer (1704-1771 ; marquis d’), Thérèse philosophe ou Mémoires pour servir à l’histoire du P. Dir rag [Girard] et de mademoiselle Eradice [Cadière], 1748 Bibliothèque nationale de France, département Réserve des livres rares, ENFER-402

Une idée de conservateur

Comme l’ont expliqué les commissaires de l’exposition Éros au secret, à Tolbiac en 2007-2008, l’émergence d’un « enfer » à la Bibliothèque royale n’est pas le fruit de consignes politiques, en réaction à une littérature libertine déjà florissante aux siècles précédents. Si ce terme à forte connotation religieuse a figuré sous la monarchie de Juillet dans les marges des inventaires pour désigner les ouvrages de cabinet, c’est-à-dire ceux qui semblaient menacer l’équilibre moral de la bonne société, c’est bien de la seule initiative des conservateurs, et précisément de Paulin Richard (1798-1871) vers 1845. Cet estimable collègue d’origine ruthénoise avait eu la tentation d’établir, avant le règne définitif de Léopold Delisle, un catalogue général des imprimés. L’enfer ainsi constitué comprenait des livres saisis par la justice, mais aussi prélevés sur le dépôt légal en raison de leur contenu.

L’article [Patrimoine] Redescendre aux enfers est apparu en premier sur Perluète.

]]>
99
[Chronique] Le jour où j’ai appris à voler d’Indrek Koff https://perluete.normandielivre.fr/chronique-le-jour-ou-jai-appris-a-voler-dindrek-koff/ Sat, 29 Dec 2018 13:36:25 +0000 https://perluete.normandielivre.fr/?p=467 Un léopard qui prend la pose, un ours qui parle et un poisson qui s’indigne : avec cette série d’histoires pour enfants, parue chez l’éditeur caennais Passage(s), Indrek Koff ravit aussi les parents.

L’article [Chronique] Le jour où j’ai appris à voler d’Indrek Koff est apparu en premier sur Perluète.

]]>

Contes à rebours

Un léopard qui prend la pose, un ours qui parle et un poisson qui s’indigne : avec cette série d’histoires pour enfants, parue chez l’éditeur caennais Passage(s), Indrek Koff ravit aussi les parents.

" Le poisson le regardait… il ne sait même pas parler. Encore un machin sans intérêt. Un paquet de tissu. Un déchet quelconque. Moi qui espérais déjà qu’on allait pouvoir parler… Mais pourquoi est-ce qu’ils s’obstinent à jeter leur détritus dans la mer ? Ils n’ont donc pas de poubelles ? "

Indrek Koff est un écrivain estonien. Il est aussi traducteur du français (Lévi-Strauss, Houellebecq). Il a été invité lors de la 27e édition des Boréales, en 2018, pour Le jour où j’ai appris à voler. Classé dans la catégorie « jeunesse », cet ouvrage qui emprunte les chemins du conte, de la fable, du récit ou du dialogue, est loin d’être réservé au jeune public. Qui a lu Les Contes du chat perché de Marcel Aymé en trouvera ici un écho. Les animaux ont la parole – même ceux en peluche dans « Nounours » et « Petit Ours » – et les humains parfois s’en mêlent : Mme Guite, photographe dans « Le Poisson », les deux frères dans « Éric et Riquet », ou encore Ella, qui ne veut pas aller se coucher, en discussion avec sa mère dans « Ella et le monde ».

© Éditions Passage(s)

« Mais qu’est-ce qui se passerait si je n’allais pas dormir ?
– Dans ce cas, le monde pourrait se faner. Regarde bien autour de toi, un soir, tu verras que tout a l’air un peu fatigué : mais quand tu rouvres les yeux le lendemain matin, le monde est de nouveau tout beau tout neuf. »

Chaque texte propose une double lecture. Le registre un peu farfelu du monde des enfants où les animaux parlent et auxquels il arrive de drôles d’histoires. Il y a un léopard mannequin dans « Antoine », par exemple. En creux apparaît un second registre, qui fait émerger un questionnement. Par exemple, Antoine le léopard est maladroit (il rate ses proies), un peu petit pour l’espèce, mais finalement, les photos sont toujours belles. Les petites contrariétés sont compensées par des réussites. Dans « Petit Ours » est abordée la question des déchets, le poisson trouvant détestable que la mer soit un dépotoir.

Si le style s’apparente souvent à celui de la fable, il n’y a jamais de morale. Chaque histoire se termine sur un commentaire bienveillant, souvent assorti d’une ellipse. Le texte, ainsi, ne se referme pas, et laisse entrouverte la porte de l’imaginaire : le lecteur peut de la sorte inventer à l’infini de multiples suites possibles.

Ce petit recueil est finalement une proposition généreuse faite au lecteur pour développer sa propre créativité.

Dominique Panchèvre

Le jour où j’ai appris à voler - Indrek Koff, Passage(s), 2018. (traduit de l’estonien par Pascal Ollivry, illustré par Marion Undusk)

 

L’article [Chronique] Le jour où j’ai appris à voler d’Indrek Koff est apparu en premier sur Perluète.

]]>
467
[Chronique] Retour à Blanchelande de Frank Lanot https://perluete.normandielivre.fr/chronique-retour-a-blanchelande-frank-lanot-le-passeur-ed-2017/ Sat, 29 Dec 2018 09:19:46 +0000 https://perluete.normandielivre.fr/?p=143 Roman où se croisent des personnages délicieux et hauts en couleur, qui évoque notre extrême-contemporain en l’ancrant dans le temps long, Retour à Blanchelande est un livre réaliste et optimiste, malgré tout.

L’article [Chronique] Retour à Blanchelande de Frank Lanot est apparu en premier sur Perluète.

]]>

Une transmission en héritage

Un homme part sur les traces de son ami d’enfance brutalement disparu, à Blanchelande, le lieu où il vécut les derniers mois de sa vie. Un roman pour continuer l’espérance.

© Belinda Cannone

Mots choisis

« La nuit était tombée en douceur, comme une écharpe de laine, mouchetée d’étoiles.
Je me mis à la fenêtre. L’air froid me barbouilla de son humidité. Bienvenue en Normandie. Je n’avais pas l’idée de dormir : je voulais voir la nuit de Blanchelande, la vivre, cette nuit comme toutes celles qu’avait connues Antoine les deux dernières années de sa vie. Je frissonne. Ma peau apprend tous les frôlements de la nuit. Des souvenirs épars, confus, se bousculaient sous mon crâne.  »

(Pages 39-40.)

« Aujourd’hui, Antoine est mort. » Alors les cinq amis de jeunesse sont venus assister à l’incinération. Deux ans avant la cardiaque, Antoine a eu une autre crise, qui a provoqué son retirement à Blanchelande, en Basse-Normandie, dans la maison de l’arrière-grand-père sculpteur de monuments aux morts. C’est Clara, l’interlocutrice, qui dira à Simon, le narrateur, pourquoi : « La fatigue… » Fatigue d’exister, d’une « vie pour rien », alors on enjoint « au futur d’aller se faire voir hier », alors le dessaisissement, l’ankylose. Mais n’est-ce pas ce qui menace Simon aussi ?

À Blanchelande, où il s’est institué exécuteur d’un testament non écrit, Simon met les chemises d’Antoine, nourrit son chat, vérifie le contenu de son ordinateur, et surtout il apprend « à faire attention aux choses ». L’attention, aptitude nouvelle en lui qui, ces derniers temps, vivait sa vie en passager distrait. Et voilà qu’il marche pieds nus sur la terre mouillée, regarde les arbres, jouit de l’air frais de la nuit sur son visage…

Puisque Antoine est parti « trop vite », comme on dit, il veillera à son héritage. Car la réponse du roman à la question du sens (de l’existence), c’est la transmission. Comme Antoine, Simon se prend d’affection et d’intérêt pour Slimane, 13 ans, venu du quartier « sensible » de la ville proche. L’appétit, l’intelligence et la curiosité du gamin donnent envie de lui offrir en partage l’héritage commun. Du football aux cathédrales, du latin au combat, de la lecture aux étymologies, tout est bon à apprendre. Le roman met en scène la passion de transmettre, la joie de former. Mais à quoi bon si la société n’accueille pas ensuite le petit Arabe méritant, comme elle n’a rien offert à Tariq, le grand frère non moins méritant de Slimane, qui n’a connu que rebuffades et en a conçu une haine effroyable ?

Slimane a ouvert la solitude d’Antoine – et de Simon – sur un horizon « et pas sur l’impasse de la réclusion », et Antoine a fait de même pour Slimane. L’amitié entre eux avait été scellée par le commentaire du gamin à propos du premier livre que lui avait fait lire Antoine (Le Sagouin, de Mauriac), remarque qui donne le sens profond du roman : « Il n’y a pas d’espoir au bout, voilà ce que j’ai trouvé... Et sans espoir...»

Roman où se croisent des personnages délicieux et hauts en couleur, qui évoque notre extrême-contemporain en l’ancrant dans le temps long, Retour à Blanchelande est un livre réaliste et optimiste, malgré tout.

Belinda Cannone

L’article [Chronique] Retour à Blanchelande de Frank Lanot est apparu en premier sur Perluète.

]]>
143
[Chronique] Les Clandestins du jour de Pierre Le Coz https://perluete.normandielivre.fr/chronique-les-clandestins-du-jour-de-pierre-le-coz/ Fri, 28 Dec 2018 13:00:46 +0000 https://perluete.normandielivre.fr/?p=425 Pierre Le Coz revient avec une fiction en forme de méditation poétique sur le monde qui nous entoure. Ce texte magnifique est jalonné de multiples questions, un vademecum réflexif, un usage du monde pour une liberté absolue, dans lequel l’écriture est à la fois une matière et une manière d’être.

L’article [Chronique] Les Clandestins du jour de Pierre Le Coz est apparu en premier sur Perluète.

]]>

La poésie en guise de survie

Pierre Le Coz revient avec une fiction en forme de méditation poétique sur le monde qui nous entoure.

« Il y avait eu autrefois des hauts faits et des chansons, des récits et des légendes. Mais qu’en était-il resté ? Rien qu’un trou dans la muraille des heures : cette faille percée par les mots dans l’enveloppe du monde. C’est à ce puits qu’il se penchait désormais, cherchant dans le temps, du haut des balcons du crépuscule, une réponse à sa souriante inquiétude – une parole pour conjurer la détresse. »

Couverture du livre Les clandestins du jour par Pierre Le Coz

Pierre Le Coz donne le ton dès les premières pages. Les Clandestins du jour, récit philosophique et poétique, serait-il la quintessence de l’œuvre considérable qui l’a précédée, à savoir L’Europe et la profondeur, neuf volumes aux nouvelles éditions Loubatière, dans lesquels l’auteur s’élève et combat contre toutes les tentatives d’enfermement qui gênent le déploiement de la vie ? La poésie n’est-elle pas cet objet littéraire irréductible ?

Si le narrateur se situe dans la position de l’observateur, il emprunte au mitan du texte un « je » qui l’unit brièvement au personnage masculin qu’il suit dans ses pérégrinations. Partout le décor est cette pièce de monnaie aux deux faces indissociables : lumière écrasante, qui s’efface quand le crépuscule nous plongera dans le noir complet ; chaleur étouffante de la ville et fraîcheur du village de montagne ; bruit incessant du tourbillon urbain, maison abandonnée et silencieuse. Pierre Le Coz nous dit « en poésie » l’importance et l’indispensable complémentarité de ces deux faces du monde, il nous encourage à prendre à bras-le-corps cette économie de l’abondance, non comme une opposition dialectique, mais comme la véritable nourriture de l’existence.

C’est aussi le labyrinthe d’un monde globalisé dont certains aimeraient nous persuader qu’il est inéluctable. Fugue poétique, ce qui nous est proposé est une manière de s’en échapper, en jouissant de chaque espace et de chaque moment. Un carpe diem en réponse au labyrinthe obligatoire.

" Elle sut alors clairement que si elle le quittait un jour ce ne serait pas par ennui ou désamour, mais pour lui épargner cette vision qu’elle avait eue et qui à présent la dévorait de l’intérieur – ce serait pour le laisser libre d’aller sur le chemin qu’il s’était tracé depuis toujours. "

Ce texte magnifique est jalonné de multiples questions, un vademecum réflexif, un usage du monde pour une liberté absolue, dans lequel l’écriture est à la fois une matière et une manière d’être.

Dominique Panchèvre

Les Clandestins du jour - Pierre Le Coz, Le Soupirail, 2018

Emission Un livre un jour

L’article [Chronique] Les Clandestins du jour de Pierre Le Coz est apparu en premier sur Perluète.

]]>
425
[Chronique] Metal de Jānis Joņevs https://perluete.normandielivre.fr/metal-janis-jonevs-gaia-2016-traduction-nicolas-auzanneau/ Fri, 28 Dec 2018 09:36:18 +0000 https://perluete.normandielivre.fr/?p=152 Révélation de la littérature lettone, Jānis Joņevs signe un premier roman en forme de récit initiatique où la musique rock et metal est le sillon de toutes les premières fois. Au-delà de la résonance autobiographique, le témoignage contemporain d’une jeunesse avide de contre-culture.

L’article [Chronique] Metal de Jānis Joņevs est apparu en premier sur Perluète.

]]>
metal Jānis Jonevs

Âge tendre et tête d’acier

Révélation de la littérature lettone, Jānis Joņevs signe un premier roman en forme de récit initiatique où la musique rock et metal est le sillon de toutes les premières fois. Au-delà de la résonance autobiographique, le témoignage contemporain d’une jeunesse avide de contre-culture.

« Joņevs ne raconte pas seulement sa jeunesse, mais celle de tous les adolescents qui se sont tournés vers cette musique, peu importe leur pays d’origine. " »

De prime abord, Metal, de l’auteur letton Jānis Joņevs, est une autobiographie narrant son adolescence à Jelgava, ville grise et triste à quelques encablures de Riga. Entre humour et mélancolie, il nous raconte les aventures de son groupe d’amis, au moment où l’identité se crée et les idées se forment.

On peut aussi y voir un roman initiatique, celui d’une jeunesse qui trouve son salut et assouvit ses désirs de rébellion dans la musique rock et metal, creusant le sillon toujours plus profondément à la recherche d’authenticité. La mort de Kurt Cobain en est le point de départ, la première des nombreuses étapes qui les mèneront jusqu’au black metal le plus extrême. Entre-temps, c’est l’histoire des premières : l’alcool, la drogue, l’amour, les bagarres… Avec Metal, Joņevs ne raconte pas seulement sa jeunesse, mais celle de tous les adolescents qui se sont tournés vers cette musique, peu importe leur pays d’origine. Chaque lecteur mélomane saura s’y reconnaître, témoignage contemporain d’une jeunesse qui, bien que désireuse de marginalité et de singularité, est de fait de plus en plus globalisée. Preuve en est : un projet d’adaptation du roman au cinéma serait en plein développement, mais l’action se déroulerait à… Marseille.

Metal est un livre prenant, touchant, à lire avec la musique très fort.

Rémy Carras

© Gaïa

Metal - Jānis Joņevs, Gaïa, 2016  (traduction Nicolas Auzanneau)

Metal (titre original : Jelgava ’94) a reçu le Prix de littérature de l’Union européenne en 2014.

L’article [Chronique] Metal de Jānis Joņevs est apparu en premier sur Perluète.

]]>
152
[Coup de cœur de libraire] L’Arbre-Monde de Richard Powers https://perluete.normandielivre.fr/coup-de-coeur-de-libraire-larbre-monde-de-richard-powers-editions-du-cherche-midi/ Thu, 20 Dec 2018 15:04:58 +0000 https://perluete.normandielivre.fr/?p=256 L’Arbre-Monde est le neuvième roman de Richard Powers traduit en français. Physicien de formation, l’auteur explore dans son œuvre les relations entre science, technologie et art, tout en étant un remarquable raconteur d’histoires.

L’article [Coup de cœur de libraire] L’Arbre-Monde de Richard Powers est apparu en premier sur Perluète.

]]>

L’Arbre-Monde est le neuvième roman de Richard Powers traduit en français. Physicien de formation, l’auteur explore dans son œuvre les relations entre science, technologie et art, tout en étant un remarquable raconteur d’histoires.

Ranger L’Arbre-Monde dans la jeune catégorie des romans écologiques serait trop réducteur. Avant d’être écologique, et c’est sa grande force, c’est avant tout un vrai roman. Il faut lire le premier chapitre et admirer le talent narratif de Richard Powers : l’histoire d’une famille d’immigrés norvégiens aux États-Unis racontée sur quatre générations, et celle d’un châtaignier qui pousse au milieu de leur ferme. Il en sera ainsi pour les neuf personnages du roman présentés tour à tour de la sorte, introduisant un récit choral d’une maîtrise époustouflante.

© Le Détour

Ce livre raconte la folie des hommes dans leur désir de richesses au-delà de ce que la nature peut permettre. Il raconte la déforestation et la lutte de quelques « illuminés » contre ce rouleau compresseur qu’est notre société. Cela n’a pas lieu de nos jours, pourtant tout cela résonne avec les préoccupations de notre époque : le réchauffement climatique, la limite des ressources naturelles de notre planète.

Loin d’être un roman à thèse, ce livre est incarné par des personnages magnifiques, par des pages sur la nature, les arbres et la forêt d’une beauté rare ; mais surtout, il est traversé par des questions sur l’homme et la société, que chacun devrait se poser aujourd’hui. Complexe, beau, riche, romanesque, ce livre est un chef-d’œuvre nécessaire.

Raphaël Naklé

Librairie Le Détour

62, rue des Juifs - 50400 Granville

www.librairie-le-detour.fr

Pénétrez dans la librairie « Le Détour » de Granville

Reportage sur la librairie « Le Détour » de Granville diffusé dans l'émission La Grande Librairie, en janvier 2019.

"Le choix des libraires vous invite à la rencontre de Fanny Héquet, la propriétaire de la librairie « Le Détour » de Granville dans la Manche. Avec elle, partagez ses coups de cœur et ses auteurs favoris comme Richard Adams, David Fauquemberg ou encore Michel Jullien."

L’article [Coup de cœur de libraire] L’Arbre-Monde de Richard Powers est apparu en premier sur Perluète.

]]>
256